Résultats et enseignements tirés des efforts déployés par le PAM pour aider les adolescentes au Niger
Par Alexandra Pirola, Benedict Tabiojong Mbeng et Mica Jenkins
Alexandra Pirola a travaillé en tant que responsable des politiques de programme à l'Unité de nutrition du Bureau de pays du Programme alimentaire mondial (PAM) au Niger entre 2015 et 2017, en mettant l'accent sur la nutrition et les questions sensibles de disparité entre les sexes. Elle est titulaire d'un master en développement international et en situations d'urgence humanitaire de la London School of Economics (LSE).
Benedict Tabiojong Mbeng est chef de la nutrition pour le bureau du PAM au Niger. Il a plus de 30 ans d'expérience dans la programmation nutritionnelle et est titulaire d'un MPH en développement sanitaire de l'Institut Royal Tropical (KIT) d'Amsterdam. Il a travaillé précédemment pour le PAM au Rwanda, en République centrafricaine et au Niger, ainsi que pour l'UNICEF en République centrafricaine.
Mica Jenkins est la responsable de la recherche et des données probantes pour la Division de la nutrition au siège du PAM. Elle est titulaire d'un master en santé et développement humain axé sur la nutrition et les systèmes alimentaires durables. Avant de rejoindre le PAM, Mica a mis en œuvre des projets de développement rural et de recherche au Mozambique et en République dominicaine.
Lieu : Niger
Ce que nous savons : la grossesse chez l'adolescente, associée au mariage précoce, augmente grandement la morbidité et la mortalité maternelles et infantiles, a de mauvais résultats à long terme et alimente la malnutrition intergénérationnelle.
Qu’apporte cet article : un projet pilote du Programme alimentaire mondial au Niger (2012-2015) a ciblé les adolescents vulnérables avec un programme commun d'éducation et de nutrition dispensé dans les écoles primaires et secondaires. Les repas quotidiens pour les filles et les garçons dans les écoles primaires ont été enrichis avec des poudres de micronutriments. Des compléments en fer et acide folique ont été distribués aux filles et aux garçons dans le secondaire. Une bourse d'études a été accordée aux filles pour les encourager à fréquenter l'école, avec une sensibilisation communautaire. La prévalence de l'anémie a diminué de façon significative pour les garçons et filles en primaire, pour les garçons dans le secondaire mais pas pour les filles dans le secondaire. Les connaissances nutritionnelles, la diversité alimentaire et la consommation d'aliments riches en fer se sont améliorées. La proportion de filles réussissant leur année scolaire a doublé. Une version adaptée et à plus grande échelle du programme vise à cibler l’éducation et l’aide aux ménages pauvres et très pauvres et à mettre en place un protocole d'apports complémentaires plus intensif, réservé aux filles. Les principales leçons à ce jour comprennent l’importance de l’alignement des politiques nationales, l’engagement multipartite, une communication solide et l'importance de l’utilisation des plates-formes existantes pour améliorer l’exécution des programmes.
Contexte
Le Niger est un pays du Sahel, enclavé, à faible revenu et en situation d'insécurité alimentaire, fortement exposé au changement climatique, se classant 187 sur 188 sur l'indice de développement humain en 2016. Plus de 2 millions de personnes souffrent d'insécurité alimentaire, 4,5 millions de personnes sont exposées à l'insécurité alimentaire, des millions souffrant d'insécurité alimentaire pendant la période de transition avant la récolte. Selon les classifications de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le Niger a un taux élevé de malnutrition aigüe globale (MAG) de 10 % et un taux très élevé de prévalence de retard de croissance de 42 % (OMS 2018). On estime que 60 % des enfants en âge scolaire au Niger ne consomment pas suffisamment de vitamine A, les taux élevés d’anémie touchant 75 % des enfants de moins de cinq ans et 46 % des femmes en âge de procréer (EDSN-MICS, 2012).
Des disparités selon le genre existent dans le système éducatif au Niger. Selon l'UNICEF, les taux de scolarisation primaire sont de 70 % pour les garçons et de 57 % pour les filles et de 14 % pour les garçons et 10 % pour les filles en scolarisation secondaire. L'accès des filles à l'éducation est limité par les pratiques culturelles, comme la responsabilité des tâches domestiques et le besoin de s'occuper des jeunes frères et sœurs, ainsi que des facteurs structurels, tels que la rareté des écoles, entraînant de longues distances de marche. Au Niger, on estime à 76 % le nombre d'adolescentes mariées avant 18 ans, et une fille sur quatre est mariée avant 15 ans. Au niveau mondial, il s'agit d'un des taux les plus élevés de mariages précoces. Le mariage précoce est en corrélation avec les taux élevés de grossesse chez les adolescentes (48 % des adolescentes au Niger ont un enfant avant l'âge de 18 ans), associé à son tour à un risque accru de mortalité maternelle, de mort à la naissance, de décès néonatal, de naissance prématurée et de faible poids de naissance (LBW) (EDSN-MICS, 2012).
Justification de l'intervention
La santé maternelle et l'alimentation contribuent de façon importante à la santé et l'alimentation de l'enfant tout au long du cycle de vie (Black et al, 2008; Victoria et al, 2008). Une femme souffrant de malnutrition est plus susceptible de donner naissance à un nourrisson de faible poids à la naissance, ce qui accroît les risques d'émaciation, de retard de croissance et de mortalité infantile et, à l’âge adulte, de maladies chroniques telles que diabète et hypertension. Cette vulnérabilité se transmet de la mère à l'enfant perpétuant le cycle intergénérationnel de la manultrition. Les adolescentes présentent un risque élevé d'anémie dû à une déplétion chronique en fer pendant le cycle menstruel ; l'anémie pendant la grossesse augmente considérablement le risque de faible poids à la naissance et de mortalité maternelle. Les interventions qui visent à réduire la prévalence de l'anémie chez les adolescentes peuvent ainsi contribuer à réduire la mortalité maternelle, les faibles poids de naissance, la malnutrition et la mortalité infantiles.
L’instruction parentale a été associée à de meilleurs résultats en matière de nutrition de l’enfant, notamment à la réduction du retard de croissance (Ruel et al, 2013). L'éducation formelle protège également les filles en réduisant le risque d'exposition aux abus, aux mariages précoces et aux grossesses précoces. La malnutrition a un impact négatif sur l'éducation en réduisant la fréquentation et les résultats scolaires et, au niveau national, réduit la contribution au développement en termes de capital humain (Victoria et al, 2008). Les interventions qui associent le maintien des adolescentes dans le système scolaire et leur meilleur statut nutritionnel peut faire face à ces questions simultanément en aidant à rompre les cycles intergénérationnels de pauvreté et de malnutrition.
Conception et mise en œuvre du projet pilote
Entre 2012 et 2015, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) Niger a entrepris un projet pilote ciblant les adolescentes vulnérables avec un programme commun d'éducation et de nutrition dans les municipalités de Dogo, Gaffati et Koleram, dans la région de Mirriah (Zinder), où la fréquentation scolaire était la plus faible du pays. Le projet a été mis en place dans 24 écoles primaires touchant approximativement 1 700 élèves de cinquième et sixième années (enfants de 10 à 15 ans), dont 48 % étaient des filles et dans six écoles secondaires, touchant environ 1 400 élèves, dont 30 % étaient des filles.
Contrairement à la plupart des programmes de repas scolaires du PAM, le projet pilote ciblait à la fois les élèves du primaire et du secondaire pour encourager la fréquentation scolaire et la performance, tout en améliorant les connaissances et le statut nutritionnels des élèves. De plus, des thèmes sensibles au genre, tels que l'importance de l'éducation des filles et les dangers du mariage précoce, ont été discutés avec les filles et les garçons. Les enfants ont été encouragés à exprimer leur opinion et leurs idées pour améliorer leur confiance et estime de soi.
En collaboration avec l'UNICEF, la composante nutritionnelle comprenait des compléments hebdomadaires de fer et d'acide folique pour les filles et les garçons dans les écoles secondaires pendant toute l'année scolaire de 2013 à 2015, selon les protocoles de l'OMS 2011 (60 mg de fer élémentaire et 2,8 mg d'acide folique par semaine). Les repas quotidiens pour les filles et les garçons dans les écoles primaires ont été enrichis avec des poudres de micronutriments. Le déparasitage a également eu lieu deux fois par an chez les enfants des écoles primaires, avec l’aide du Ministère de l’éducation.
La composante éducation ciblait les filles des ménages classés comme pauvres et très pauvres en utilisant l'approche de l'économie familiale (HEA), avec une bourse mensuelle pour deux années académiques (évaluée à 7 USD par mois) pour faciliter et encourager la fréquentation scolaire. 272 adolescentes ont reçu cette bourse d'étude en 2013-2014 et 232 en 2014-2015. Au cours de la deuxième année du projet pilote, des comités locaux ont été créés pour soutenir et suivre le processus de bourses en réponse à une recommandation de l'examen à mi-parcours visant à améliorer les résultats scolaires des filles. Des sessions de sensibilisation ont également été tenues dans les écoles et au niveau communautaire, orientées sur l'éducation des filles ainsi que les pratiques familiales, l'hygiène, l'assainissement, l'alimentation et les questions de genre.
Le coût total de la phase pilote était juste inférieur à 1,3 million de dollars, hors supplémentation, en partenariat avec l'UNICEF.
Résultats de la phase pilote
Une réduction significative de la prévalence de l'anémie a été observée chez les enfants en école primaire ciblés ; de 63 % à 58 % pour les filles et de 62 % à 60 % pour les garçons. Dans les écoles secondaires, le taux d'anémie chez les garçons est passé de 62 % à 60 % (voir tableau 1). Les résultats ont également révélé que l'anémie est principalement modérée1 chez les garçons et filles affectés. Aucun impact n'a été observé en ce qui concerne les compléments en fer et en acide folique chez les filles dans les écoles secondaires. En fait, le taux d'anémie a augmenté de 35,0 % à 40,8 %. L'équipe émet l'hypothèse que ceci est dû à l'impact du début de la menstruation. De plus, les garçons ont tendance à acheter des collations à base de viande alors que les filles achètent plutôt des produits non alimentaires, conduisant à une faible consommation d'aliments riches en fer.
Tableau 1 : prévalence de l'anémie au début et à la fin du projet pilote
On a observé de meilleurs résultats scolaires chez les filles du secondaire ciblées ; le pourcentage de filles qui ont réussi leur année scolaire est passé de 32 % (2013-2014) à 68 % (2014-2015). Les comités locaux, composés de membres communautaires familiarisés avec le contexte local et les difficultés rencontrées par les adolescentes, se sont révélés essentiels, à mi-parcours du projet, pour améliorer le pourcentage de filles qui ont réussi leur année scolaire.
La diversité alimentaire s'est significativement améliorée chez les garçons et les filles dans les écoles primaires (garçons de 60,6 % à 78,6 % et filles de 60,9 % à 82,1 %) et dans les écoles secondaires (garçons de 66,1 % à 84,2 % et filles de 70,8 % à 81,6 %), avec une augmentation notable du pourcentage atteignant une diversité alimentaire élevéedans tous les groupes. La consommation d'aliments riches en fer a augmenté également dans tous les groupes (école primaire filles 34,3 % à 48,6 % et garçons 33,8 % à 80,8 % ; garçons dans le secondaire 35,9 % à 55 %), à l'exception des filles dans le secondaire, dont la consommation reste stable (42,0 % à 42,6 %). Un questionnaire que l'on a fait remplir à la fois aux groupes de contrôle et aux groupes d'intervention a révélé que les connaissances en matière de nutrition se sont également améliorées chez les garçons et les filles des écoles primaires et secondaires.
Les pratiques en matière sanitaire et d’hygiène, bien qu’elles se soient déjà révélées solides au départ, ont été approuvées et soutenues par l’intervention.
Intensification et intégration au sein de l'intervention prolongée de secours et de redressement (IPSR) du PAM
Le PAM met en œuvre actuellement une intervention prolongée de secours et de redressement (IPSR) au Niger, visant à renforcer la résistance des ménages et des communautés grâce à une approche nationale, intégrée, multisectorielle et multipartite de réduction des risques et de mise en place de filets de sécurité. L'IPSR est dirigée par le gouvernement du Niger en partenariat avec le PAM, l'UNICEF, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Fonds international de développement agricole (FIDA) et d'autres organisations non gouvernementales (ONG).
Initiée en 2014, cette intervention s'appuie sur un package intégré d'activités, visant les ménages les plus vulnérables. Le package vise à aider les ménages à renforcer leur résistance en ciblant les différents membres comme suit : dépistage et traitement de la malnutrition chez les enfants de moins de deux ans et chez les femmes enceintes ; information, éducation et communication (IEC) sur la nutrition, DA, assainissement et hygiène pour l'ensemble du ménage ; alimentation scolaire pour les enfants en âge scolaire ; transferts de fonds, sous réserve qu'ils participent à la création d'activités liées aux actifs productifs ; et des transferts de fonds sans conditions pendant la saison maigre. Il est mis en place dans les sept régions (37 municipalités) du Niger.
Le projet pilote a réussi à améliorer la fréquentation scolaire, la performance et l’estime de soi des filles, ainsi que l’acceptation des compléments d'acide folique par les adolescents et les membres de la communauté et les connaissances sur le DA. Le manque d’impact sur la prévalence de l’anémie chez les filles du secondaire pendant le projet pilote a montré la nécessité d’augmenter la quantité de compléments fournis (conformément aux recommandations actualisées de l’OMS) et de sensibiliser davantage les filles à la consommation d’aliments riches en fer et à l'amélioration du DA. Un nouveau cycle de l'IPSR a démarré en janvier 2017 et a permis d'inclure une version adaptée et étendue du projet pilote adolescent dans la stratégie d'intervention pour toutes les régions.
Les adolescentes âgées de 10 à 19 ans issues de ménages vulnérables bénéficiant déjà du package intégré d’activités dans le cadre de l’IPSR reçoivent désormais un soutien supplémentaire ciblé pour améliorer leur fréquentation scolaire et leur alimentation. Environ 13 130 adolescentes ciblées ont reçu des bourses scolaires dans le cadre du programme et 50 636 adolescentes ciblées ont reçu des compléments de fer-acide folique (environ 0,5 % de la population adolescente au Niger). En raison des contraintes de ressources et des besoins nutritionnels spécifiques des adolescentes, les adolescents ne sont pas inclus dans le programme de renforcement. Le renforcement des repas dans les écoles primaires avec du MNP a également été interrompu pour s'aligner sur la stratégie nationale nouvellement établie pour les repas scolaires, qui est centrée sur le renforcement «naturel» par des combinaisons alimentaires et une DA améliorée.
Contrairement à la phase pilote, qui ciblait les adolescents scolarisés pour un apport de compléments, le programme à grande échelle fournit des compléments à toutes les filles entre 10 et 19 ans dans des ménages ciblés, que le destinataire soit l'enfant du chef de famille ou la femme/mère adolescente. Cet ajustement de la stratégie de ciblage contribue à garantir que les filles non scolarisées bénéficient également de l'assistance nutritionnelle. Dans le cadre du programme à grande échelle, l'apport complémentaire est passé à des suppléments quotidiens de fer et d'acide folique2 (contenant 60 mg de fer et 400 µg d'acide folique), conformément aux directives actualisées de l'OMS (OMS, 2016).
Comme dans la phase pilote, les filles reçoivent une bourse mensuelle de 7 USD destinée à couvrir leurs besoins de base et à les encourager à poursuivre leurs études. Le paiement de la bourse dépend de la fréquentation scolaire, qui est surveillée. Les filles sont aidées par les comités locaux existants, tels que les comités de gestion scolaire, les associations parents-professeurs, les professeurs et les responsables locaux qui s'assurent de la présence des filles et examinent les motifs de leur absence ainsi que leurs conditions de vie et d'études.
Des activités de familiarisation et de sensibilisation à l'égalité des sexes ont été poursuivies au sein de l’IPSR au niveau des écoles et des communautés, bien que ces activités soient désormais menées par des animateurs communautaires qualifiés plutôt que par le personnel des ONG pour améliorer le contrôle et la pérennité de ces activités. Les filles et garçons ainsi que les membres communautaires sont sensibilisés à l'importance et aux avantages de l'éducation des filles et aux risques liés aux mariages et aux grossesses précoces. Les adolescents sont également soutenus dans le développement d'aptitudes à la vie quotidienne et formés à la définition d'objectifs et à la gestion financière (nouveauté depuis le projet pilote), renforçant ainsi leur confiance et leur autonomie.
L'adhésion au programme sera mesurée à mi et fin de parcours de l'IPSR3. Deux indicateurs mesureront toute diminution de l'incidence de l'anémie : proportion d'adolescents âgés de 10 à 19 ans dans les ménages ciblés ayant reçu des apports complémentaires de fer-acide folique pendant trois mois consécutifs et prévalence de l'anémie, mesurée par l'enquête démographique et sanitaire (DHIS) pour 2017 et 2021 (les données EDS régionales/divisionnaires seront examinées). Cette activité est renforcée par une éducation en matière de nutrition, avec une attention particulière portée sur les besoins nutritionnels pendant l'adolescence, les émission radio et la communication interpersonnelle sur les sites de distribution. Les sessions de sensibilisation sont également menées toute l'année dans des écoles primaires et secondaires ciblées.
Défis, enseignements tirés et voie à suivre
Il est primordial de garantir l'alignement avec les politiques et les stratégies nationales pour l'adoption du projet et sa durabilité.
L'intervention s'aligne sur la politique nationale en matière de sécurité nutritionnelle (2016-2025) et sur le plan national multisectoriel pour la santé des jeunes et des adolescents (2017-2021. Ces documents importants comprennent des interventions programmées pour le début de 2018 et qui visent à réduire la prévalence de l’anémie durant l’adolescence par la distribution de suppléments de fer et d’acide folique et par la sensibilisation et la communication en vue d'un changement comportemental en matière de régime et d'habitudes alimentaires. La distribution de bourses d’études aux filles s’aligne sur les priorités du plan du secteur de l'éducation et de la formation (2014-2014), lequel vise à combler l’écart entre les sexes en matière d'éducation et à soutenir le maintien des filles à l’école.
L’utilisation de plateformes existantes et de la présence de PAM permettent d’offrir un nouveau programme.
L’intégration du soutien aux adolescents à l’intérieur de l'ensemble d'activités intégré du programme IPSR du PAM a permis de maximiser l’impact, étant donné que les communautés étaient familières avec le PAM et lui faisaient confiance, et que les plateformes existantes pouvaient être utilisées. Par exemple, la distribution de suppléments de fer et d’acide folique aux adolescentes fait partie d’une nouvelle intervention au Niger, et les parties prenantes ont exprimé des préoccupations à propos des filles qui se présentent aux sites de distribution. Une communication efficace entre les superviseurs du projet et les bénéficiaires avant la distribution pour aborder ces problèmes, a permis de garantir que 90 % des filles admissibles ont reçu des suppléments durant la saison creuse de 2017. De plus, la plateforme de distribution alimentaire générale, ainsi que le processus de tri et d’orientation des enfants souffrants de malnutrition, est maintenant utilisée pour distribuer des suppléments, ce qui permet de réduire les coûts.
Les interventions qui ciblent les adolescents exigent la création d’un environnement éducatif propice.
Un environnement propice est nécessaire pour offrir un programme nutritionnel dans les écoles. Par exemple, la sensibilisation des enseignants sur des thèmes associés garantit qu’ils s’intéresseront et participeront aux activités du projet, ce qui stimulera la durabilité de l’impact du programme dans les écoles et dans la communauté. Dans plusieurs écoles au Niger, tout comme dans plusieurs autres pays en développement ayant un taux de croissance élevé de sa population, il existe une très forte demande d’enseignants et un manque de ressources pour la formation des enseignants au-delà d’un niveau très élémentaire. Cela diminue la qualité générale de l’éducation. Le nombre élevé d’élèves crée aussi une pression sur l’infrastructure et les ressources scolaires, ce qui entraîne souvent la création de classe inadéquate et un manque de classe et de matériels scolaires.
Pour affronter ces défis, le PAM Niger concentre ses interventions dans les « municipalités convergentes », les endroits identifiés comme les plus vulnérables par le gouvernement nigérien et où l'on demande au système des Nations unies et à la communauté humanitaire de centrer leurs efforts. L’harmonisation et l’intégration des activités sont assurées dans ces zones par des investissements dans des écoles, pour embaucher plus d’enseignants, améliorer l’environnement scolaire (en fournissant des toilettes, des réfectoires et de l’eau) et fournir des ressources scolaires. Cela permet ainsi de créer un environnement scolaire propice qui maximise l’impact des interventions du PAM auprès des adolescents.4
Une communication efficace tout au long du projet est essentielle pour que cette mise en œuvre se déroule rondement.
Pendant la phase pilote, plusieurs activités ont été mises en place dans les écoles par des partenaires coopérants à l'insu des autorités scolaires, des services scolaires décentralisés, des services de santé du district ou des établissements de santé locaux. À l’époque, ces autorités ignoraient tout des activités organisées dans le cadre du programme, et même, du programme en soi. Cette ignorance a conduit à une participation plus faible des autorités décentralisées et à une surveillance insuffisante de ces activités, ce qui a réduit le sentiment d’acceptation et de responsabilisation des interventions. Les partenaires coopérants devraient donc communiquer efficacement avec l’administration scolaire et tous les intervenants compétents aux niveaux du district et local avant d’organiser toute activité dans des établissements scolaires pour garantir que les avantages sont bien compris, pour maximiser la participation et pour éviter l’interruption des activités scolaires.
L’adoption d’approches multipartites est beaucoup plus efficace.
L’UNICEF a participé à l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi du programme pendant la phase pilote. L’organisme a aussi participé à la conception du programme à plus grande échelle, en particulier à la partie nutritionnelle (y compris l'apport complémentaire) et à la stratégie communicationnelle. La prochaine étape pour le PAM Niger est de collaborer à la mise en œuvre du programme avec différents partenaires ayant des atouts complémentaires, tel que le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l’entité de l’ONU pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU Femmes) et le programme de l’ONU sur le VIH/sida (ONUSIDA). Les discussions se poursuivent avec ces partenaires concernant l'intégration d’activités de sensibilisation au VIH/sida et aux sexospécificités, ainsi que de la création d’espaces accueillants pour les adolescents dans les écoles et d’activités liées à la santé sexuelle.
Il faut assurer une responsabilisation aux niveaux communautaire, régional et national pour bien réussir un tel projet.
Le projet établit des partenariats avec le gouvernement, par l’intermédiaire des ministères compétents (c.-à-d. de l’éducation et de la santé), et par l’intermédiaire du Haut-Commissariat à l’initiative 3N (les Nigériens nourrissent les Nigériens), aussi connue sous le nom de l’initiative 3N. Ces intervenants participent à un comité d’orientation qui fournit une supervision et des conseils techniques. La participation des représentants gouvernementaux aux niveaux national, régional et communautaire est impérative pour bien réussir ce projet. Pendant la phase pilote, malgré l’importante participation du gouvernement national, les autorités régionales et locales décentralisées n’ont pas été suffisamment impliquées dans la conception, la mise en œuvre et le suivi du projet, ce qui a entraîné un manque de responsabilisation de leur part. Avec l'intensification des efforts, l’engagement total des homologues gouvernementaux à tous les niveaux a été assuré par une série de visites du comité de suivi national dans chaque région où le programme a été mis en place. Ce comité a tenu des réunions bilatérales avec les intervenants régionaux concernés pour des retours d'informations. On a alors créé des comités régionaux pour prendre en charge une supervision plus étroite des activités. Ces comités ont rendu visite aux autorités locales pour s’assurer de leur engagement complet.
Conclusions
Une bonne nutrition est importante tout au long d'une vie. Mais elle est particulièrement importante durant les 1 000 premiers jours de vie, où elle a un impact incontestable sur la croissance, les capacités d’apprentissage et la future productivité d’un enfant. Il est difficile de compenser certaines privations survenues durant cette période de vie, mais c’est possible à l’adolescence. Pour briser le cycle de la malnutrition intergénérationnelle, l’intégration d’un ensemble d’interventions multisectorielles ciblé sur les adolescents, qui comprend des programmes éducatifs et nutritionnels, est nécessaire.
Les leçons tirées de la phase pilote du PAM ont démontré qu’une participation active de la communauté — des adolescents et adolescentes, des femmes et des hommes — à tous les stades du programme, ainsi qu’une coordination étroite avec le gouvernement et d’autres partenaires dans le but d’améliorer la plateforme de service, peuvent aider à effacer les barrières posées par des normes d’accessibilité et socioculturelles, lesquelles influent sur la bonne nutrition des adolescentes au Niger.
Pour obtenir plus d’informations, veuillez contacter Benedit Tabiojong Mbeng ou Mica Jenkins.
Footnotes
1Faible anémie : le niveau d’hémoglobine d’un enfant âgé de 5 à 11 ans se situe entre 110 et 114 g/l et entre 110 et 119 g/l chez un enfant âgé de 12 à 15 ans et plus.
2Contient 30 à 60 mg de fer élémentaire.
3Il a été impossible de mener une collecte de données de référence, due à la rentrée des classes.
4Ces activités ont débuté en septembre 2017 ; aucune évaluation sur leur impact n’a pu être menée.
Références
Black, R, et al. Maternal and child undernutrition: Global and regional exposures and health consequences. Lancet. 2008;371:243-60.
EDSN-MICS, 2102. Niger Demographic and Health Survey and Multiple Indicator Cluster Survey) (EDSN-MICS) IV, 2012.
Ruel, M, Alderman, H and the Maternal and Child Nutrition Study Group. Nutrition-sensitive interventions and programs: How can they help accelerate progress in improving maternal and child nutrition? Lancet. 2013;382(9891):536–551.
Victoria, CG, et al. Maternal and child undernutrition: consequences for adult health and human capital. Lancet. 2008;371:340-57.
OMS, 2016. Ligne directrice : l'apport complémentaire quotidien en fer chez les femmes adultes et les adolescentes. Genève : Organisation mondiale de la santé ; 2016.
OMS, 2018. Base de données internationale sur la croissance des enfants et la malnutrition. Disponible à l'adresse : www.who.int/nutgrowthdb/about/introduction/en/index5.html.