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Continuité de l’information dans les interventions de nutrition en Inde : expériences du Jharkhand

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Par Ipsha Chaand

Ipsha Chaand poursuit des études de doctorat au Centre de médecine sociale et santé des collectivités de l’Université Jawaharlal Nehru, à New Delhi (Inde).

Ce travail s’appuie sur une partie de la thèse de doctorat de l’auteur.

Lieu : État du Jharkhand (Inde)

Ce que nous savons : La continuité de l’information désigne la disponibilité et l’utilisation d’informations qui lie les prestataires de soins de santé aux bénéficiaires et permet une cohérence des soins dans le temps et entre les différents niveaux sanitaires. Elle est essentielle pour assurer une continuité des soins en cas de malnutrition aiguë.

Qu'apporte cet article : Une étude de cas réalisée dans l’État du Jharkhand (Inde) a exploré le continuum du partage d’informations entre les prestataires de soins et les bénéficiaires en fonction des différents niveaux de soins en Inde, que ce soit dans le cadre communautaire (à domicile) ou en établissement de santé. Des entretiens avec des mères/pourvoyeurs de soins et des infirmières dans des centres de traitement de la malnutrition ont révélé de nombreuses lacunes dans la nature des informations transmises et le moment où elles sont échangées entre les travailleurs sanitaires de première ligne, le personnel des établissements, les mères/pourvoyeurs de soins et les communautés. Ces lacunes se répercutent sur la prévention (signes de danger manqués, par exemple), le traitement (référence tardive ou refusée pour des cas graves) et la réhabilitation (absence de soutien au niveau de la communauté après la sortie, par exemple). Des actions visant à améliorer la continuité de l’information autour de la prise en charge des cas de malnutrition aiguë ont été identifiées, notamment : donner aux travailleurs sanitaires de première ligne des orientations claires sur la communication lors du référencement des patients, la formation du personnel des établissements de santé sur les messages contextuels et sur la communication entre l’établissement de santé et les services communautaires pour chaque enfant après sa sortie.

Contexte

L’expression « continuum de soins » désigne un système qui guide les bénéficiaires dans les services de santé au cours du temps et les empêche de sortir du parcours de soins grâce à un suivi régulier. Le continuum de soins couvre la prestation d’une gamme de services de soins de santé à différents niveaux, qui sont opportuns, cohérents et appropriés.1 Un facteur essentiel du continuum de soins est la continuité de l’information, c’est-à-dire la disponibilité et l’utilisation d’informations qui mettent en relation les prestataires de soins de santé et les bénéficiaires et permettent la cohérence des soins dans le temps et à tous les niveaux de la pyramide sanitaire. Un bon flux d’informations permet également de faire le lien entre les différents prestataires de soins de santé entre eux pour faciliter la coordination des soins, le diagnostic précoce, l’élaboration d’un schéma thérapeutique approprié et la fourniture de soins cohérents pour éviter qu’un bénéficiaire échappe au continuum.

La continuité de l’information repose sur le partage de l’information et sur une bonne communication entre les prestataires de soins de santé et les bénéficiaires. Ceci va au-delà du simple transfert d’informations et comprend l’intégration de processus permettant la création conjointe de schémas thérapeutiques appropriés. L’une des principales exigences de la continuité de l’information est la diffusion de messages clairs que les bénéficiaires peuvent correctement comprendre et mettre en œuvre. Les connaissances, les croyances et les pratiques communautaires en matière de soin et d’alimentation des enfants influencent l’interprétation des messages par la mère/pourvoyeur des soins. La mise en pratique des conseils en matière de soins est elle-même influencée par la position socio-économique et culturelle des mères/personnes qui s’occupent des enfants (Ramji, 2009). Cette interprétation régit à son tour les habitudes en matière de soins et d’alimentation qui sont déterminantes pour la prévention, le traitement et la réhabilitation des enfants souffrant de malnutrition. 

Cet article examine l’interaction entre la continuité de l’information et les résultats du traitement (taux d’abandons élevé, taux de guérison faible et non-réponse secondaire au traitement). S'appuyant sur les résultats d'une étude de cas réalisée dans l'État du Jharkhand (Inde), il analyse le continuum du partage d'informations entre les prestataires de soins et les bénéficiaires à différents niveaux des soins en Inde, depuis le domicile (soins à base communautaire) jusqu’aux soins en établissement de santé et au retour à domicile.

Traitement de la malnutrition aiguë en Inde

En Inde, l’intervention principale contre la malnutrition aiguë est axée sur la lutte contre la malnutrition aiguë sévère (MAS) par un traitement des cas en milieu médical dans des centres de réhabilitation nutritionnelle (CRN), également appelés centres de traitement de la malnutrition (CTM). Ce modèle d’intervention nutritionnelle comporte deux points de contact majeurs : l’établissement de soin et la communauté. Au niveau de l’établissement de soin (CRN/CTM), les cas de MAS présentant des complications médicales sont traités grâce à des aliments thérapeutiques et des soins médicaux, sur le modèle de l’expérience africaine de prise en charge de la MAS. Comme les interventions contre la malnutrition en Inde ne comportent pas de composante communautaire forte, les soins au niveau de la communauté ou axés sur la famille sont essentiels. Une rupture du continuum dans les services de soins (entre les soins en établissement de santé et ceux au niveau de la communauté) a été établie comme l’une des raisons pour lesquelles la gestion de la MAS en Inde présente de piètres résultats de traitement (Dasgupta & Chaand, 2018). En outre, l’Inde présente une prévalence élevée de retard de croissance et, dans de nombreux États, le retard de croissance et l’émaciation coexistent chez les enfants de moins de cinq ans. Cela a abouti à des recommandations pour un schéma thérapeutique prolongé permettant d’obtenir les gains de poids ciblés (Dasgupta et al, 2014).

Nutrition dans l’État du Jharkhand

Selon la quatrième Enquête nationale sur la santé familiale (NFHS-4), 2015-16, le Jharkhand figure parmi les cinq États ayant la prévalence la plus élevée de malnutrition chez les enfants de moins de cinq ans en Inde. Près de la moitié des enfants (45,3 %) présentent un retard de croissance (supérieur à la moyenne nationale de 38,4 %), et 29 % sont émaciés. Près de la moitié (47,8 %) présentent une insuffisance pondérale.    

Le Jharkhand, comme la plupart des États indiens, possède un système de santé à trois niveaux comprenant des centres de soins de santé primaires, des centres de santé communautaires et des hôpitaux de district. Le principal modèle de prise en charge de la malnutrition consiste à traiter les enfants âgés de 3 à 6 ans par l’intermédiaire de centres anganwadi, dans le cadre des services intégrés pour le développement de l’enfant (ICDS en anglais). L’État n’offre aucune prestation de soins ni soutien aux enfants de moins de trois ans. Des journées mensuelles de la santé et de la nutrition sont organisées dans les villages et comprennent le dépistage des enfants souffrant de malnutrition sévère et leur référencement vers un centre de traitement de la malnutrition pour des soins supplémentaires. Au Jharkhand comme dans le reste de l’Inde, les soins à base ommunautaire sont en grande partie assurés par des travailleurs sanitaires de première ligne, notamment des employés d’anganwadis (AWW), des agents sanitaires et sociaux certifiés (ASHA) et des infirmières-sage-femmes auxiliaires (ANM). Ces travailleurs sont responsables de la promotion de la santé, de la prévention, du référencement des cas compliqués de MAS et de la réhabilitation à base communautaire des enfants sortis de l’hôpital en continuant la supplémentation nutritionnelle et le suivi. 

Méthode de recherche

Cette étude a adopté une méthode d’étude de cas. Six centres de traitement de la malnutrition (CTM) situés dans le Jharkhand ont été utilisés comme cas d’étude. Des entretiens approfondis ont été menés dans ces CTM avec 10 infirmières et 15 mères/pourvoyeurs des soins qui accompagnaient les enfants hospitalisés. En outre, 20 travailleurs sanitaires de première ligne (AWW et ASHA) de la communauté ont été interrogés sur la base de guides d’entretien semi-structurés. Les données ont été transcrites, codées et analysées. Les documents programmatiques et les rapports (publiés et non publiés) ont également été utilisés pour extraire des données essentielles.

Résultats

Prévention

L’étude indique que la continuité de l’information entre les travailleurs sanitaires de première ligne et les bénéficiaires est insuffisante pour soutenir les mères/pourvoyeurs de soins et pour leur donner les moyens de prévenir la malnutrition chez les enfants de moins de cinq ans. D’après les résultats obtenus, le partage d’informations entre ces travailleurs de première ligne et les mères/pourvoyeurs de soins est insuffisant pour leur donner les moyens de détecter les signes de danger, de prendre des mesures de précaution et/ou de rechercher les soins de santé appropriés pour le traitement de leurs enfants lorsque ceux-ci souffrent de malnutrition. Les résultats indiquent également que les personnes qui s’occupent des enfants ne reçoivent pas l’aide nécessaire de la part des travailleurs sanitaires de première ligne pour s’occuper des soins et de l’alimentation des enfants atteints de MAM ou de MAS non compliquées ou des enfants sortis des CTM.

L’étude a permis de constater de nombreux exemples de mauvaise interprétation ou de mauvaise compréhension des informations fournies par les travailleurs sanitaires de première ligne aux mères et de la manière dont cela peut compromettre les soins. Par exemple, l’explication de l’allaitement exclusif porte sur le fait de ne pas donner de nourriture ni de miel aux nourrissons ; les mères considèrent donc que l’allaitement exclusif permet de donner de l’eau à leur bébé. Il peut aussi y avoir une ambiguïté dans les informations fournies. Par exemple, « se nourrir à intervalles fréquents » ne définit pas quelle est la durée d’un intervalle. Les travailleurs sanitaires de première ligne conseillent aux mères de se laver les mains avant de donner de la « nourriture » (khana) aux enfants. Culturellement, par khana, on entend un repas. Il a été constaté que, bien que les mères se lavent les mains avant chaque repas, elles ne le font pas avant de nourrir d’autres aliments entre les repas. Cette différence dans la compréhension des termes utilisés par les travailleurs sanitaires de première ligne et les mères/pourvoyeurs de soins régit les comportements réels quant à l’alimentation adaptée à l’âge et les soins qui reposent sur les besoins des enfants.

La maladie et la malnutrition sont intrinsèquement liées. Un traitement approprié et rapide de la maladie chez les enfants est essentiel pour prévenir la malnutrition (Dasgupta et al, 2012). L’analyse a révélé que les mères et les pourvoyeurs de soins étaient peu aptes à détecter les signes de danger chez leurs enfants. Le transfert de connaissances à la communauté – concernant les prestataires de soins et les établissements de soins appropriés pour la fourniture de différents services de santé aux enfants – était insuffisant. Par conséquent, les pourvoyeurs de soins n’utilisent pas les services disponibles ou se présentent au mauvais niveau de service lorsque leur enfant est malade, ce qui fait qu’ils sont susceptibles d’être renvoyés sans faire l’objet d’aucune action.

Traitement

Pour dépister et traiter rapidement les enfants souffrant de malnutrition, il est essentiel de communiquer les bonnes informations au bon moment. L’une des principales fonctions du continuum de soins est de garantir une prise en charge en temps opportun. Le manque de communication précise et adéquate avec la famille sur le besoin de référencement est un facteur important de délai pour accéder et utiliser les soins appropriés au bon moment.

Cette étude a révélé que les travailleurs sanitaires de première ligne n’informent pas systématiquement les mères des dangers que représentent un ralentissement de la croissance, une stagnation de la croissance ou encore un décrochage de la courbe de croissance. Les mères ne sont informées de l’état de croissance de leurs enfants que si un enfant tombe dans la zone rouge du graphique de suivi de croissance ou sur la bande de mesure du périmètre brachial (PB) ou s'il présente des signes visibles de dénutrition.

Une fois que les travailleurs sanitaires de première ligne ont identifié un enfant « à risque », ils informent la mère/le pourvoyeur de soins que son enfant est en train de devenir 'kamzor' (faible) et leur conseillent de 'bien nourrir' et de 'bien s’occuper' des enfants.2 Aucune des mères interrogées n’a pu expliquer ce que cela signifie dans la pratique. Les travailleurs sanitaires de première ligne ne surveillent pas le déclin régulier du poids de l’enfant ni ne cherchent les raisons d’un tel déclin ; les mères/pourvoyeurs de soins ne sont informées que lorsque la croissance ralentit gravement, justifiant une référence thérapeutique. Lors de l’identification d’un enfant MAS, la mère est informée que l'enfant est devenu « bahut kamzor » (trop faible) et qu’il a besoin de soins médicaux. Cependant, la cause de la faiblesse, les conséquences possibles d’un recours tardif aux services de santé et l’importance de la récupération nutritionnelle ne sont pas expliqués.

En règle générale, les travailleurs sanitaires de première ligne conseillent les mères en cas de besoin de référence. Si une mère ne parvient pas à convaincre son mari ou sa famille de la nécessité de ce besoin, les travailleurs sanitaires de première ligne tentent de conseiller eux-mêmes à la famille de se rendre au CRN/CTM. Cependant, la population locale n’est pas informée du fait que la MAS est une maladie qui nécessite des soins médicaux. Au contraire, on la signale souvent à la famille comme une maladie locale appelée « kamzori » ou « puni / puniya ». La population locale a sa propre compréhension culturelle de la cause et du traitement de cette maladie et préfère donc se faire soigner par des guérisseurs traditionnels ou religieux. Ainsi, en raison de la connaissance insuffisante de la malnutrition et de sa gestion, les familles refusent les référencements, ne les acceptant que si les guérisseurs ne parviennent pas à soulager l’enfant malade.

Avant de référer les mères/pourvoyeurs de soins vers les CRN/CTM, les travailleurs sanitaires de première ligne ne les préparent pas adéquatement en ce qui concerne l’admission dans l’établissement de soin, la durée probable du séjour, le traitement et ses résultats. Les mères/pourvoyeurs de soins ne sont pas informés que l’enfant est référé pour évaluer son état de malnutrition et qu’il pourra être admis pour un traitement. Comme ces personnes ne sont pas préparées pour un séjour de 14 à 21 jours, elles doivent rentrer chez elles pour prendre les dispositions nécessaires et revenir au bout de quelques jours. Cela entraîne un retard pour débuter le traitement dans l’établissement de soin ou un refus d’admission.   

Lorsqu’un enfant souffrant de MAS se voit refuser l’admission dans un établissement de soin, les professionnels de santé ne notifient pas ses parents des raisons de ce refus. De pareilles expériences créent une méfiance chez les parents quant à la crédibilité des travailleurs sanitaires de première ligne, de telle sorte que la population locale refuse de donner suite aux référencements que ceux-ci émettent par la suite. Il n’existe pas non plus d’échange d’informations entre les travailleurs sanitaires de première ligne et les prestataires de soins du CRN/CTM concernant les enfants à qui l’admission est refusée pour des soins hospitaliers ; alors que ces travailleurs ne sont pas non plus équipés pour fournir des soins appropriés à ces enfants dans la communauté.

Les travailleurs sanitaires de première ligne informent généralement les parents que la malnutrition est une maladie qui peut être traitée au CRN/CTM. Cette compréhension que la malnutrition est une maladie et que l’alimentation thérapeutique est un médicament sème la confusion dans l’esprit des mères/pourvoyeurs de soins. Avant qu’une mère/un pourvoyeur de soins amène son enfant au CRN/CTM, les travailleurs sanitaires de première ligne l’informent que l’enfant sera traité avec « un bon médicament ». Percevant les aliments thérapeutiques comme des aliments, et non comme des médicaments, les mères/pourvoyeurs de soins sont souvent troublés et se sentent déçus que leur enfant ne reçoive pas de traitement médical. Elles ne comprennent pas non plus pourquoi certains enfants sont soumis à divers tests et reçoivent des pilules et des sirops, tandis que d’autres non. Les mères rapportent que, lorsqu’elles demandent des informations sur les différences de traitement dans l’établissement de soin, les infirmières et les médecins ne répondent pas à leurs questions, les amenant à se sentir discriminées, rejetées et induites en erreur.

Les mères/pourvoyeurs de soins semblent être plus satisfaits du traitement lorsque les médecins contrôlent les enfants avant l’admission et lorsque leurs enfants subissent des tests et que des médicaments leur sont prescrits. Les infirmières du CRN/CTM jouent un rôle important dans la motivation des mères à rester dans l’établissement jusqu’à la fin du traitement. Il a été constaté que les mères/pourvoyeurs de soins étaient plus satisfaits dans les établissements où les infirmières fournissaient des mises à jour régulières sur l’état de santé des enfants, répondaient convenablement à leurs questions, dissipaient leurs doutes et donnaient des conseils sur les pratiques de soins et d’alimentation (oralement et par un soutien en matière de soins et d’alimentation). 

Réadaptation

Les résultats montrent que, pendant leur séjour prolongé, les mères/pourvoyeurs de soins ne sont pas suffisamment préparés aux soins à prodiguer à leur enfant après la sortie. Les travailleurs sanitaires de première ligne et les médecins/infirmières conseillent les mères/pourvoyeurs de soins sur les aspects relatifs aux « traitement » ; cependant, aucun n’est informé des besoins de « réadaptation » de son enfant. Pendant le traitement des patients hospitalisés, les mères/pourvoyeurs de soins reçoivent des conseils sur les soins et l’alimentation appropriés. Toutefois, les séances de counseling sont compliquées à cause du manque de personnel et de temps spécialement dédiés à cette fonction, du manque de séances individuelles, du manque de conseils spécifiques au contexte et du manque de matériel de communication, d’information et de sensibilisation approprié pour faciliter l’apprentissage et la rétention des mères/pourvoyeurs de soins.

Ni les mères/pourvoyeurs de soins ni les travailleurs sanitaires de première ligne ne comprennent la différence entre la sortie de l’établissement de soin et la fin du programme de nutrition. La sortie de l’établissement est accordée sans que les mères/pourvoyeurs de soins soient pleinement informés de la raison pour la fin des soins en milieu hospitalier et de l’importance des visites de suivi et des pratiques de soins et d’alimentation une fois le patient sorti. Ils ne sont pas non plus informés de la nécessité de contacter les travailleurs sanitaires de première ligne qui les aideront à continuer les soins à domicile. Par conséquent, bien que les mères/pourvoyeurs de soins soient en droit de demander l’aide des travailleurs sanitaires de première ligne, ils ne le font pas. D’après ce qu’ils ont compris, les enfants sortis de l’établissement sont complètement guéris, si bien qu’ils ne se rendent souvent pas aux consultations de suivi et reprennent leurs pratiques habituelles en matière de soin et d’alimentation de l’enfant.

À la sortie du patient du CRN/CTM, les antécédents pathologiques ne sont pas communiqués aux travailleurs sanitaires de première ligne concernés ; et ils ne reçoivent aucune aide pour élaborer un schéma thérapeutique approprié pour permettre la continuité des soins communautaires de l’enfant sorti. Les travailleurs sanitaires de première ligne ne sont pas conscients de leur rôle dans la réhabilitation des enfants souffrant de MAS, notamment en ce qui concerne la surveillance régulière de la croissance, la fourniture d’aliments nutritionnels supplémentaires, le suivi, le soutien aux soins prodigués aux enfants et les mesures à prendre en cas de ralentissement de la croissance. Ils ne participent que très peu, voire pas du tout, à la réadaptation des patients sortis d’hospitalisation. Ce sont les mères/pourvoyeurs de soins qui, en plus de leurs responsabilités habituelles, les prennent en charge, sans recevoir le soutien qui leur permettrait d’atténuer et de surmonter les défis liés à la garde des enfants des enfants.

Conclusion et recommandations

Cette petite étude a révélé de nombreuses possibilités d’améliorer la continuité de l’information concernant la prise en charge des cas de malnutrition aiguë, ce qui devrait améliorer les résultats. L’efficacité de la communication est essentielle pour promouvoir la prévention et le dépistage précoce, le traitement efficace et la réhabilitation des enfants souffrant de MAS.

Les prestataires des différents niveaux de soins doivent être en mesure de fournir des informations et un soutien appropriés afin d’aider les mères/pourvoyeurs de soins à améliorer leurs comportements en matière de santé et à surmonter les obstacles aux bonnes pratiques sanitaires. Des messages doivent être soigneusement rédigés en se basant sur les besoins sanitaires et le contexte socioculturel propres à la population locale et aux bénéficiaires. La structure sanitaire actuelle offre un espace pour le counseling au niveau local, que ce soit de façon collective, notamment à l’occasion des journées de la santé et de la nutrition dans les villages, ou de façon individuelle par des visites à domicile. Dans les deux cas, le counseling devrait être axé sur l’évaluation des pratiques en matière d’alimentation et de soins, l’inventaire des problèmes et la diffusion d’informations permettant de les surmonter, la fourniture de conseils réalisables en matière de soins et la sensibilisation sur la détection des signes de danger. Lorsqu’une référence s’impose, tant au niveau de la communauté qu’à celui de l’établissement de soin, le counseling devra inclure des informations sur l’endroit vers lequel l’enfant est orienté, les raisons du référencement et ce qu’il comportera, de façon à gérer les attentes et à donner toutes ses chances à la famille d’accéder au service disponible approprié et d’en bénéficier. En outre, les professionnels de la santé communautaires et ceux des établissements doivent être en mesure de communiquer entre eux de manière à faciliter une référence efficace de la communauté vers l’établissement, puis le retour à la communauté, afin d’assurer la continuité des soins pour chaque enfant.

Les mesures recommandées sont les suivantes :

  • La fourniture de directives claires aux travailleurs sanitaires de première ligne sur la prise en charge de la malnutrition chez les enfants de moins de cinq ans, y compris des consignes précises concernant le référencement des enfants avec les messages importants à transmettre aux pourvoyeurs de soins au moment du référencement ;
  • La formation des prestataires de soins de santé, tant au niveau de l’établissement de soin qu’à celui de la communauté, sur les réalités sociales, économiques et culturelles de la collectivité, sur la fourniture de soins appropriés à ces réalités et sur la rédaction de messages de santé spécifiques au contexte ;
  • Le recrutement, dans les CTM, de conseillers en nutrition formés (ou la formation du personnel infirmier existant) qui dispenseraient des services de counseling en matière de nutrition et de santé aux pourvoyeurs de soins lors de l’admission et de la sortie de leur enfant, y compris sur les soins et l’alimentation appropriés ;
  • Le partage d’informations concernant tous les cas qui sortent des centres de traitement de la malnutrition avec les établissements de soins de santé primaires et les travailleurs sanitaires de première ligne afin de permettre une surveillance et un suivi efficaces au niveau de la communauté ;
  • Le renforcement de la coordination entre la Mission nationale pour la santé et les Services intégrés pour le développement de l’enfant (ICDS) en ce qui concerne le dépistage précoce des enfants à risque, la prévention secondaire, le référencement des cas et la prise en charge communautaire des enfants souffrant de malnutrition.

Pour en savoir plus, veuillez contacter Ipsha Chaand.


Endnotes

1Consultez l’aperçu de la recherche dans le numéro de Field Exchange intitulé « Programmatic approaches for nutritional care in India : Perspectives on continuum of care », qui résume un travail de recherche du même auteur.

2Les mots kamzor (« faible ») et kamzori (« faiblesse ») sont utilisés au niveau local par les membres de la communauté ainsi que par les prestataires de soins de santé pour désigner un enfant souffrant de malnutrition.


Références

Dasgupta R, Arora N, Ramji S, Chaturvedi S, Rewal S, Suresh K, Thakur N. (2012). Managing Childhood Under-Nutrition. Role and Scope of Health Services. Economic and Political Weekly, 47(16), pages 15 à 19.

Dasgupta R, Sinha D & Yumnam V. (2014). Programmatic Response to Malnutrition in India: Room for More Than One Elephant? INDIAN PEDIATRICS, 51, pages 863 à 868.

Dasgupta R & Chaand I. (2018). Programmatic Approaches for Nutritional Care in India: Addressing the Continuum of Care Perspectives. INDIAN  PEDIATRICS, 55, pages 653 à 656.

Ramji S. (2009). Impact of infant & young child feeding & caring practices on nutritional status & health. Indian J Med Res, 130, pages 624 à 626.

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