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Mise en place des critères d'admission élargis (CAE) pour la malnutrition aiguë en Somalie : enseignements provisoires

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Par John Ntambi, Pramila Ghimire, Ciara Hogan, Madina Ali Abdirahman, Dorothy Nabiwemba, Abdiwali Mohamed Mohamud, Abdirizak Osman Hussien, Kheyriya Mohamed Mohamud, Samson Desie, Grainne Moloney, Ezatullah Majeed. 

John Ntambi est le responsable en nutrition du bureau de l'UNICEF en Somalie. Médecin détenteur d'un master en santé publique et nutrition, il a plus de quinze ans d'expérience dans les programmes de santé et de nutrition, notamment en Ouganda, au Rwanda, en Eswatini, au Tchad, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, en Éthiopie, au Burundi et (actuellement) en Somalie.

Pramila Ghimire est responsable de la nutrition et des cantines scolaires pour le Programme Alimentaire Mondial (PAM) en Somalie. Pramila est titulaire d’un master de nutrition en santé publique, de sociologie et d'administration des affaires et possède plus de 18 ans d’expérience dans les domaines de la sécurité alimentaire et de la nutrition, à la fois dans le cadre du développement et en situation d’urgence.

Ciara Hogan est diététicienne et travaille pour la section nutrition de l'UNICEF en Somalie. Avant de rejoindre l’UNICEF, elle a travaillé pour Concern Worldwide au Niger. Ciara est titulaire d’un master en nutrition pour la santé mondiale de la London School of Hygiene and Tropical Medicine.

Madina Ali Abdirahman est responsable de la nutrition à l'UNICEF en Somalie, et a plus de 15 ans d'expérience dans le domaine de la nutrition auprès de l'UNICEF et d'organisations non gouvernementales (ONG) en Somalie.

Dorothy Nabiwemba est responsable de la nutrition pour l'UNICEF en Somalie. Auparavant, elle a travaillé pour le Programme Alimentaire Mondial au Sud-Soudan en tant qu'analyste en nutrition et coordinatrice du passage à l’échelle de la nutrition. Dorothy est nutritionniste et titulaire d’un master en santé publique.

Abdiwali Mohamed Mohamud est responsable de la Prise en charge intégrée de la malnutrition aiguë / Résilience pour l’UNICEF à Dollow (Somalie). Il fournit un appui technique et opérationnel aux homologues gouvernementaux et aux ONG partenaires. 

Abdirizak Osman Hussein a travaillé pour l'UNICEF en Somalie pendant 16 ans et est actuellement responsable du programme de nutrition au bureau de Baidoa. Il a plus de 28 ans d'expérience en nutrition et en santé publique auprès d'agences des Nations unies et d'ONG.

Kheyriya Mohamed Mohamud est chef de l'unité de nutrition au Département de la santé publique du Ministère fédéral de la santé en Somalie. Elle est professionnelle de la santé publique et possède un master en santé publique et un diplôme de troisième cycle en nutrition humaine et en diététique.

Samson Desie est spécialiste en nutrition, il travaille actuellement avec l'UNICEF en tant que coordonnateur du groupe sectoriel sur la nutrition en Somalie. Il a plus de 10 ans d’expérience dans la gestion de programmes complexes et à grande échelle, notamment au Sud-Soudan et au Soudan.

Grainne Moloney travaille depuis 18 ans dans le secteur du développement, dont 15 ans pour les Nations Unies. Elle travaille actuellement en tant que spécialiste régionale de la nutrition dans les situations d'urgence et de la malnutrition aiguë sévère au bureau régional de l'UNICEF pour l'Afrique de l’Est et l’Afrique Australe.

Sayed Ezatullah Majeed est chef du bureau de terrain de l'UNICEF en Somalie. Il a également travaillé pour l'UNICEF en Afghanistan, en Érythrée, en République populaire démocratique de Corée, au Soudan, au Sri Lanka et au ministère de la Santé en Afghanistan. Majeed est médecin et titulaire d’un master en planification stratégique et d’un diplôme de troisième cycle en nutrition.

Les auteurs remercient les donateurs de ce programme, notamment les Protection Civile Et Operations d'Aide Humanitaire Européennes (ECHO), le Bureau d'assistance des États-Unis en cas de catastrophe à l’étranger (OFDA), la Chine, Food for Peace de l'USAID et le Département du Développement International  Britannique (DfID).

Les résultats, interprétations et conclusions de cet article n'engagent que leurs auteurs. Ils ne représentent pas nécessairement les vues de l'UNICEF, de ses directeurs généraux ou des pays qu'ils représentent et ne doivent pas leur être attribués.

Lieu : Somalie

Ce que nous savons : la Somalie se caractérise par une prévalence élevée et persistante de l'émaciation et une insécurité qui entrave souvent l'accès au traitement.

Qu'apporte cet article : Dans les districts somaliens instables et touchés par la sécheresse, une analyse des lacunes réalisée par le Groupe Nutrition en 2017 a montré que sept zones touchées par la sécheresse bénéficiaient de services de traitement de la malnutrition aiguë sévère (MAS) mais pas de traitement de la malnutrition aiguë modérée (MAM). À titre exceptionnel, l’UNICEF a mis en œuvre des critères d’admission élargis (CAE) combinant les traitements MAS et MAM (à l’aide d’un aliment thérapeutique prêt à l’emploi (ATPE) pour tous), menés dans sept districts par 11 partenaires. Les défis opérationnels comprenaient la faible capacité des partenaires locaux (reflétée par une mauvaise application du protocole et des données de suivi insuffisantes), les défis liés à l'approvisionnement en ATPE et le faible accès de la population aux soins de santé primaires. La couverture du nombre total de cas de malnutrition aiguë a atteint 53 %. La performance était conforme aux normes Sphère pour six partenaires avec des données adéquates. Les principales actions en cours comprennent le renforcement des capacités des partenaires, une amélioration de l’assurance qualité et du suivi, ainsi que l’analyse des coûts pour ce contexte fragile et difficile sur le plan opérationnel.

Contexte

La situation nutritionnelle en Somalie est caractérisée par une prévalence persistante de l'émaciation, avec une malnutrition aiguë globale (MAG) > 10 % et des poches de MAG supérieures au seuil d'urgence fixé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) (> 15 %). Au cours des 12 dernières années, la prévalence de la MAG n'a jamais été inférieure à 10 % (graphique1).

Graphique 1 : Tendances de la MAG et MAS en Somalie 2007-2018

Les causes principales de l'émaciation en Somalie comprennent : l'insécurité alimentaire ; une morbidité élevée (en partie à cause de l'accès limité aux services sociaux de base tels que les soins de santé et l'approvisionnement adéquat en eau, assainissement et hygiène (EAH)) ; le conflit ; les chocs climatiques ; et des facteurs sous-jacents tels que la mauvaise gouvernance, la marginalisation et les inégalités. L'accès humanitaire pour fournir des services aux communautés vivant dans des zones difficiles à atteindre, souvent contrôlées par des acteurs non étatiques, est limité. Au plus fort de l'intervention face à la sécheresse de 2017, une cartographie des « clusters »  a révélé des districts avec une absence totale ou partielle de services de nutrition vitaux, en grande partie à cause de contraintes de sécurité dans des zones partiellement contrôlées par des acteurs non étatiques. Sept districts des régions du centre-sud de la Somalie disposaient de programmes thérapeutiques ambulatoires (PTA) opérationnels pour la prise en charge de la malnutrition aiguë sévère (MAS), mais aucun programme d'alimentation complémentaire ciblé (PACC) pour la prise en charge de la malnutrition aiguë modérée (MAM). Cela s'explique en partie par une politique exigeant que les PACC opérationnels soient accessibles au personnel du Programme Alimentaire Mondial (PAM) ou aux contrôleurs tiers désignés par le PAM pour effectuer le suivi et la supervision mensuels du programme. Les districts « critères d’admission élargis » (CAE) ne sont pas accessibles au personnel de l’UNICEF de la même manière ; toutefois, en tant que prestataire de dernier recours, l’UNICEF peut faire appel à des contrôleurs tiers pour qu’ils se rendent sur les sites de mise en place tous les trimestres afin d’évaluer la qualité du service et d’assurer un certain degré de supervision du programme. Ce système atténue les risques pour le personnel tout en permettant à l'UNICEF de répondre à l'impératif humanitaire.

Justification de l'adoption des critères d'admission élargis

À la fin de 2017, l’UNICEF et le PAM ont convenu d’appliquer une pratique décrite dans un mémorandum d’accord de 2011 (MoU) 1 pour traiter la MAM avec des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi (ATPE) en l'absence de PACC dans les districts où l’UNICEF est présent. La pratique des CAE est conforme à l’agenda du Plan de Réponse Humanitaire (HRP) et est décrite dans la directive opérationnelle intérimaire concernant la MAM2 du Cluster Global Nutrition (GNC) et dans la directive opérationnelle intérimaire concernant les programmes de prise en charge communautaire de la malnutrition aiguë dans des circonstances exceptionnelles.3 Avec l'aide de ces documents, un consensus a été développé au niveau national et une directive conjointe de l'UNICEF et du PAM a été formulée pour aider à mettre en œuvre les CAE dans les PTA de Somalie par les partenaires des organisations non-gouvernementales (ONG). 

Processus de mise en œuvre des CAE

Le 3e Plan somalien de rationalisation du Cluster Nutrition, actuellement en cours de développement par le Ministère de la Santé, recommandera que les PTA et les PACC fonctionnent « sous le même toit », à l'aide du même partenaire de mise en œuvre. Cette approche, et celle des CAE, est destinée à ce que les cas de MAS et de MAM soient traités au sein de la même infrastructure, assurant l'accès aux services de traitement contre la malnutrition aiguë tout en faisant appel aux mêmes ressources, afin de minimiser les coûts fixes et les coûts opérationnels, de simplifier les structures organisationnelles et de permettre un meilleur passage des patients d'un service à l'autre. En vertu de ce protocole (décrit dans le Tableau 1), les enfants souffrant de MAS et de MAM reçoivent tous les éléments minimum du programme de services de nutrition de base, y compris les vaccinations, le déparasitage, la supplémentation en vitamine A et des conseils en alimentation du nourrisson et du jeune enfant (ANJE). Les enfants souffrant de MAM reçoivent une ration hebdomadaire d'un sachet d'ATPE / jour jusqu'au moment de leur sortie qui correspond à un PB ≥ 12,5 cm, tandis que le traitement et les soins de la MAS sans complications continuent de suivre les directives nationales somaliennes de la prise en charge intégrée de la malnutrition aiguë (PECIMA). Étant donné l'absence de centres de stabilisation dans les zones les plus difficiles à atteindre, les enfants souffrant de MAS avec complications sont envoyés dans les centres de stabilisation des districts accessibles.

Stratégie de sortie

La mise en œuvre des CAE est une stratégie temporaire pour sauver des vies dans des zones spécifiques comme convenu par le Cluster nutrition, le PAM, l'UNICEF et le Ministère de la Santé. Lorsque la situation sécuritaire s'améliorera et que les endroits spécifiques deviendront accessibles pour la mise en œuvre et le suivi du programme, la mise en place des CAE cessera et la prise en charge de la MAM sera transférée au PAM. De plus, les CAE ne pourront seulement continuer tant que les partenaires de la mise en œuvre ont accès aux zones spécifiées et que le risque de perte des ressources de l'UNICEF peut être minimisé.

Tableau 1 : Protocole de gestion de la MAS et de la MAM dans le cadre des CAE        

en traduction - Version française bientôt disponible

Calendrier de mise en œuvre des CAE

Le calendrier des activités liées à l’adoption de l’approche CAE est présenté dans le graphique 2 ci-dessous.

Graphique 2 : Calendrier de mise en œuvre des CAE

en traduction - Version française bientôt disponible

Le processus a démarré à l'origine avec une analyse des lacunes au cours du dernier trimestre de 2017, qui a permis de cartographier la distribution des services existants à travers le pays. S'appuyant sur les enseignements tirés de cette analyse, le PAM et l’UNICEF se sont réunis pour parvenir à un accord sur l’adoption de l’approche CAE dans les districts sans traitement de la MAM mais avec présence de PTA. Le ministère de la Santé, l'UNICEF et le PAM ont convenu des critères de sélection des districts suivants : un taux de malnutrition supérieur au seuil d'urgence ; le PAM n'est pas en mesure d'appuyer la mise en œuvre du programme en raison de sa politique interne en matière d'accès. Une collecte de fonds a été sollicitée au premier trimestre de 2018 et le bureau régional de l'UNICEF a été consulté sur la conception technique du projet. Des directives ont été élaborées au deuxième trimestre de 2018 avec la contribution du PAM, du Cluster nutrition et du ministère de la Santé. À la suite d’une réponse positive des donateurs, 10 partenaires de mise en œuvre appartenant aux sept districts CAE ont été sélectionnés pour assurer la mise en place des CAE, basé sur leur présence actuelle et leur capacité technique à offrir des services pour la MAM et la MAS. Les estimations du nombre de cas proviennent des estimations de la prévalence saisonnière de l'unité d'évaluation de la sécurité alimentaire et de la nutrition (FSNAU 4).

En juillet 2018, les 10 partenaires ont été réunis dans un atelier de lancement au cours duquel l'UNICEF a défini l'approche technique ainsi que les attentes du programme. Les documents relatifs au programme ont ensuite été signés et, à compter du mois d’août, après réception de l'approvisionnement, les partenaires ont commencé la mise en œuvre du programme. En décembre 2018, un autre district, où l'accessibilité s'était détériorée en raison de problèmes de sécurité, a été identifié par le PAM pour les CAE. Une ONG internationale a été engagée pour prendre en charge les cas dans ce district ; la mise en œuvre a débuté en mars 2019. Onze partenaires travaillent donc maintenant sur l'implémentation des CAE dans huit districts des régions du centre-sud de la Somalie, notamment les régions de Hiran, Bay, Galgaduug, Jubbada Hoose et Bakool.

Expériences concernant la mise en œuvre

Bien qu'il soit encore trop tôt pour comprendre totalement les implications opérationnelles de l'approche CAE et les facteurs qui affectent son efficacité et sa durabilité, un premier atelier de revue a été organisé au début du mois de février 2019 dans le but d'analyser les données émergentes et de discuter des points forts et des défis de l'approche jusqu'à présent. Neuf partenaires ont participé à l'atelier, dont huit ONG locales et une ONG internationale, avec la participation et le soutien de l'UNICEF, du PAM, du Groupe nutrition et du Ministère de la Santé. C’était la première fois que les partenaires se réunissaient pour partager leurs expériences en matière de mise en œuvre et la première fois que l'UNICEF avait l'occasion de comprendre les réalités pratiques du déploiement sur le terrain. Les sections suivantes présentent les enseignements tirés des différentes perspectives, éclairées par l’atelier de février. 

L'expérience de l'UNICEF

Rendre opérationnels les CAE dans le contexte de la Somalie est particulièrement complexe et difficile. Les districts sélectionnés pour les CAE ont été choisis en raison de leurs niveaux élevés de malnutrition, de leur accessibilité limitée et des risques de sécurité par rapport à d’autres régions du pays. La capacité globale des partenaires de mise en œuvre en est donc limitée et la capacité d'attirer du personnel hautement qualifié dans ces zones est considérablement réduite. Les contrôleurs tiers, comme les partenaires, manquent souvent de l'expertise technique nécessaire pour superviser et évaluer la qualité des services de cette approche innovante.

Dans l’ensemble, les partenaires de mise en œuvre semblent confrontés à des problèmes de respect du protocole des CAE, comme en témoignent les résultats variables en matière de traitement d’un partenaire à l’autre, tels que la durée du séjour et la quantité d’ATPE nécessaires pour traiter un cas de MAM. Des ressources sont donc nécessaires pour renforcer les capacités des partenaires, pour organiser des ateliers de formation et pour garantir le respect du protocole de traitement.

Malgré les difficultés rencontrées, des enfants auparavant inaccessibles sont désormais en mesure de recevoir un traitement susceptible de leur sauver la vie. De plus, les CAE sont susceptibles de fournir une plate-forme pour l’extension à un ensemble de services intégrés dans certains districts. Cependant, certaines questions n'ayant pas pu être traitées pendant l'atelier de revue de février 2019 seront une priorité lors des prochaines réunions de bilan. Ces questions incluent par exemple le niveau de changement ou d’adaptation des ressources humaines nécessaires à la mise en œuvre des CAE, le coût réel par cas de MAM traité et la capacité de gestion de la chaîne d’approvisionnement des partenaires pour éviter les pertes d’ATPE dans ces zones difficiles d’accès.

Expérience des partenaires

La continuité du pipeline d’approvisionnement en ATPE, qui était souvent perturbé par des transports routiers précaires, a constitué un obstacle majeur à la mise en œuvre des CAE. En conséquence, certains partenaires ont signalé une inadéquation entre le nombre de cas estimé dans leurs zones d'intervention et l'approvisionnement alloué. D’autres partenaires ont soulevé des difficultés à répondre aux besoins en soins de santé primaires de la communauté locale, notamment le manque de supplémentation systématique en vitamine A, de traitement du paludisme, de traitement de la diarrhée et de déparasitage. Le suivi des cas a également posé problème à cause des déplacements de populations à la recherche de pâturages et d’eau pour le bétail dans certains districts. Enfin, les agents de santé communautaires ont été décrits par certains partenaires comme ayant un manque de compétences essentielles pour appuyer la prestation des services, tandis que l'augmentation du nombre de cas, signalée par certains partenaires, pèse sur le personnel de santé.

Parmi les principaux accomplissements qu'ont relevés les partenaires, notons l’aptitude à prendre en charge des enfants qui n’avaient auparavant aucun accès aux services essentiels à leur survie, les réactions positives de la communauté à l’égard du service, et les cas de MAM constamment supérieurs aux cas de MAS. Le tout semble indiquer que la communauté a bien intégré que les services sont disponibles et peuvent être utilisés.  

Analyse des données et résultats

Au cours de l'atelier, les données ont été extraites – depuis le début de la mise en œuvre (d’août à octobre 2018) jusqu’à janvier 2019 – à partir de diverses sources, notamment des registres du PTA et des rapports mensuels du PTA (avec des données ventilées pour le PTA et les admissions MAM) ; des fiches de stock d'ATPE ; des fiches de suivi du PTA ; et des copies des rapports trimestriels soumis à l’UNICEF.

Guidés par le personnel de l’UNICEF et du PAM, des petits groupes de travail ont résumé les données essentielles dans des tableaux Excel, incluant notamment des détails concernant les admissions et les résultats (MAS et MAM), ainsi que l’utilisation d’ATPE et la durée estimée de séjour.

Suite à l'atelier, les données de tous les partenaires ont été compilées et analysées. Les résultats ont montré des différences significatives au niveau de l’exhaustivité des données, avec seulement deux partenaires sur les neuf disposant de données complètes dans tous les domaines, ce qui démontre d’importantes contraintes de contexte. Prenant en compte ces limites, les principales conclusions provenant de l'analyse des données sont les suivantes :

  • En janvier 2019, presque 11 000 enfants avaient été traités pour une malnutrition aiguë sur un volume total prévu de 20 615 enfants (taux de couverture de 53 %) sur six mois. Sur ces 11.000 enfants, 30 % (2 398) étaient des cas de MAS (taux de couverture de 70 %) et 70 % (8 559) étaient des cas de MAM (taux de couverture de 50 %) n'ayant auparavant pas accès à ces services.
  • Des informations sur les sorties provenant de six partenaires ont montré que les résultats étaient systématiquement conformes aux normes Sphère pour les programmes MAM avec des décès < 3 %, des patients perdus de vue < 15 % et des cas de guérison > 75 % (graphique 4).
  • Les données de quatre partenaires ont montré qu’il fallait un carton d’ATPE pour traiter 2,9 enfants (fourchette : 1,0 - 5,37) souffrant de MAM et 0,97 enfant (fourchette : 0,22 - 2,0) souffrant de MAS. Concernant la MAS, la moyenne est conforme aux directives nationales alors que pour la MAM, la moyenne est presque deux fois plus importante que les 1,67 enfant estimés par carton. Les données sur la performance ne semblent pas être affectées par les différences considérables au niveau des quantités d’ATPE utilisées par les partenaires, mais cela requiert un suivi et un examen plus attentifs.
  • D'après les données de trois partenaires, la durée moyenne de séjour d'enfants considérés comme étant guéris et aptes à sortir s'élève à 7,6 semaines pour la MAM (minimum 4 semaines, maximum 9 semaines), et 7,3 semaines pour la MAS (minimum 5 semaines, maximum 13 semaines).

Graphique 3 : Total de cas de MAM et MAS traités, d'août 2018 à janvier 2019

en traduction - Version française bientôt disponible

Graphique 4 : Résultats des sorties dans le cadre du programme CAE, d'août 2018 à janvier 2019

en traduction - Version française bientôt disponible

Discussion et prochaines étapes

Un niveau global, l’intérêt pour le continuum des soins et le développement d’un protocole combiné/simplifié pour le traitement de la MAM et la MAS ne cesse de croître, et des recherches sont en cours dans plusieurs pays d’Afrique. Les méthodes appliquées dans cette approche varient d'un contexte à l'autre. D'après notre expérience, il n’existe pas de solution ou modèle universel. La Somalie s'engage dans un processus d'apprentissage et nous espérons mieux comprendre, avec le temps, la viabilité et l’efficacité de l'approche d'élargissement des critères d'admission (CAE) dans cette situation d’urgence.

Les enseignements provisoires suggèrent qu'il faut renforcer la capacité des partenaires pour que les CAE soient conformes au protocole. Pour ce faire, il faut mettre en place des réunions de bilan des performances et un partage d'informations. La mise en place de bilans trimestriels et l’analyse et interprétation régulière des données permettront de repérer les problèmes rapidement, d’améliorer sans cesse la qualité des soins aux patients, et de formuler des hypothèses concernant l’efficacité de l’approche. Grâce à une mise en œuvre surveillée de plus près et à un contrôle de qualité permis par des visites sur le terrain, les contrôleurs tiers ont la garantie d'être davantage soutenus. Agir dans un contexte aussi fragile que la Somalie représente un coût plus élevé que dans des contextes plus stables. Ce problème s'aggrave dans les zones plus difficiles à atteindre et pourrait avoir des répercussions sur la longévité de cette approche. Des questions relatives à la protection doivent également être posées ; des mères parcourent de longues distances à la recherche de services qui pourraient les exposer à des risques, dans des zones où les prestations de services de toute sorte sont limitées. À l’avenir, nous espérons entreprendre une analyse des coûts, en comparant le modèle CAE au modèle dans sa forme classique, pour aider à l’élaboration d’un modèle adapté au contexte somalien.

Prochaines étapes :

  • L'UNICEF doit apporter un soutien supplémentaire pour améliorer les capacités des partenaires d'exécution par le biais de réunions trimestrielles de bilan des performances.
  • L'UNICEF doit renforcer les capacités des contrôleurs tiers pour surveiller et rendre compte des activités des CAE.
  • Les partenaires et l'UNICEF doivent poursuivre la mise en œuvre et participer à l'élaboration de rapports mensuels d'assurance qualité et d'analyse.
  • L'UNICEF doit continuer à renforcer les capacités des partenaires dans les domaines clés, notamment l'élaboration de rapports d'activité, l'estimation du nombre de cas, la planification de l'approvisionnement en ATPE et le respect du protocole.
  • L’UNICEF doit plaider au sein du Cluster santé pour l'intégration de certains éléments de soins de santé primaires dans cette approche, tels que la vaccination et le traitement de la diarrhée.
  • L'UNICEF et le PAM doivent rechercher des financements pour permettre aux femmes enceintes et allaitantes malnutries d'être prises en charge et de faire partie des critères élargis.
  • L’UNICEF, le PAM, le Ministère de la Santé et les partenaires doivent élaborer un protocole CAE unique et adapté au contexte somalien, qui sera déclenché en situation d’urgence ou en cas d'accès limité

Pour en savoir plus, veuillez contacter John Ntambi.


Footnotes

1MOU WFP-UNICEF: Areas of Technical Cooperation – March 2011. http://nutritioncluster.net/resources/mou-wfp-unicef-march-2011/ last accessed 30 November 2018

2Global Nutrition Cluster (2017) Moderate acute malnutrition: a decision-tool for emergencies. Global Nutrition cluster MAM Task Force, updated March 2017.

3Interim operational guidance for CMAM programming in exceptional circumstances; http://nutritioncluster.net/interim-operational-guidance-cmam-programming-exceptional-circumstances/

4Food Security and Nutrition Assessment Unit of the United Nations Food and Agriculture Organization: www.fsnau.org/

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