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Intégration du dépistage de la malnutrition aiguë dans la campagne de supplémentation en vitamine A menée dans les camps de réfugiés rohingya durant la pandémie de COVID-19

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Par Bakhodir Rahimov, Karanveer Singh et Piyali Mustaphi

Bakhodir Rahimov est coordinateur du Secteur nutrition dans le district de Cox’s Bazar, au Bangladesh. Il possède plus de 15 ans d’expérience en médecine générale et d’urgence et a collaboré pendant plus de 12 ans dans de nombreux pays avec l’UNICEF, dans le domaine de la nutrition et de la santé maternelle, néonatale et infantile.

Karanveer Singh est pédiatre et responsable de la nutrition au bureau de l’UNICEF à Cox’s Bazar. Depuis plus de 30 ans, il travaille dans de nombreux pays en tant que médecin et dans le domaine de la santé publique, dans des contextes d’action humanitaire et de développement. 

Piyali Mustaphi est responsable de la section Nutrition au bureau de pays de l’UNICEF au Bangladesh. Elle possède plus de 28 ans d’expérience en tant que nutritionniste en santé publique, dont 22 ans de collaboration avec l’UNICEF en Afrique, en Asie du Sud et au Moyen-Orient. 

Les auteurs remercient l’ensemble des partenaires du Secteur nutrition pour le rôle qu’ils ont joué dans les activités décrites dans le présent article. Ils remercient en particulier le Bureau du Commissaire à l’aide aux réfugiés et au rapatriement (RRRC) et le Bureau du responsable des questions de santé publique au niveau du district pour leur soutien constant. Les auteurs remercient également la section Nutrition du bureau de l’UNICEF à Cox’s Bazar, qui a fourni des suppléments en vitamine A, conçu le contenu de la campagne intégrée de supplémentation et élaboré et distribué les supports de communication. Ils remercient enfin les partenaires du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et du Programme alimentaire mondial (PAM) pour leur contribution à la couverture élevée de la première phase de la campagne de supplémentation en vitamine A qui a eu lieu en 2020. 

Lieu : Cox’s Bazar, Bangladesh

Ce que nous savons : La pandémie de COVID-19 a eu des répercussions sur le dépistage communautaire et les campagnes de vaccination, dont elle a réduit le taux de couverture.

Ce que cet article nous apprend : Une campagne intégrée et adaptée de supplémentation en vitamine A a été menée avec succès dans des camps de réfugiés rohingya grâce à une stratégie de porte-à-porte privilégiée en lieu et place des traditionnels grands rassemblements dans les centres de soins nutritionnels. Les enfants atteints de malnutrition aiguë sévère (MAS) et de malnutrition aiguë modérée (MAM) ont été recensés au moyen des seuils de périmètre brachial (PB) adaptés recommandés par le Cluster nutrition global (MAS : PB < 120 mm et MAM : 120 mm ≤ PB < 135 mm) La campagne a permis de fournir une supplémentation en vitamine A à 155 080 enfants rohingya âgés de 6 à 59 mois (soit 97 % de la population appartenant à cette tranche d’âge) et d’effectuer un diagnostic en mesurant leur périmètre brachial. La malnutrition aiguë (sévère ou modérée) a été détectée chez 7200 d’entre eux, en grande majorité chez les enfants âgés de 6 à 23 mois. Les partenaires du secteur ont recensé 132 enfants en situation de handicap, qu’ils ont orientés vers les services adéquats. La réussite de cette campagne a notamment résidé dans le recrutement de bénévoles communautaires en nutrition rémunérés issus de la population rohingya, ainsi que dans les mesures de prévention et de contrôle des infections, qui ont réduit le risque d’exposition à la COVID-19.

Contexte

Depuis 2017, année où a débuté la crise humanitaire qui touche le district de Cox’s Bazar au Bangladesh, le Secteur nutrition supervise les interventions nutritionnelles d’urgence menées auprès des Rohingya et des communautés d’accueil. Dans les camps de réfugiés, quelque 270 000 enfants et femmes enceintes et allaitantes bénéficient régulièrement de services de nutrition. Depuis janvier 2020, ces derniers ont été renforcés. Jusqu’alors assurés dans le cadre d’un éventail de 84 programmes de traitement ambulatoire, et de programmes d'alimentation supplémentaire ciblés et non-ciblés, ils sont désormais mis en œuvre par un réseau de 46 centres de soins nutritionnels intégrés. Ces centres visent à offrir un guichet unique où tout enfant souffrant d’émaciation peut bénéficier de différents services au même endroit, ce qui garantit la continuité des soins et l’efficacité des prestations, et où les mères et les pourvoyeurs de soins ayant besoin d’une aide en matière d’alimentation du nourrisson et du jeune enfant et de pratiques de puériculture peuvent accéder aux services nécessaires.

La pandémie de COVID-19 a eu des conséquences néfastes sur la prestation de services, notamment des services de nutrition, dans les camps de réfugiés rohingya et les communautés d’accueil. À la suite des restrictions de déplacement mises en place par le Gouvernement du Bangladesh en mars 2020, la couverture des services de nutrition et des activités de sensibilisation communautaires s’est considérablement réduite. L’interruption des mesures anthropométriques effectuées au moyen de pèse-personnes et de toises et le ralentissement des consultations dans les centres de soins nutritionnels intégrés se sont traduits par une baisse importante des admissions aux programmes de prise en charge de l’émaciation. Le dépistage communautaire de la malnutrition aiguë dans les communautés d’accueil a fortement reculé, passant de 41 282 personnes dépistées en janvier 2020 à seulement 1414 au mois de mai. Dans les camps de réfugiés rohingya, la couverture du dépistage est passée de 132 507 personnes en janvier 2020 à 64 653 en avril (source : rapports 4W mensuels). De ce fait, le Secteur nutrition a dû adapter en urgence les stratégies programmatiques existantes afin d’assurer la continuité des services de prise en charge de la malnutrition aiguë sévère (MAS) et de la malnutrition aiguë modérée (MAM)1. L’un de ces ajustements a consisté à intégrer le dépistage de la malnutrition aiguë à une campagne adaptée de supplémentation en vitamine A, menée dans les camps de réfugiés rohingya du 21 juin au 15 juillet 2020.

Stratégie de terrain intégrée pour la supplémentation en vitamine A

Faisant suite à une analyse approfondie des facteurs de risque de contraction de la COVID-19 dans les camps de réfugiés, le Secteur nutrition, en concertation avec ses différents groupes de travail techniques2, a adopté les recommandations mondiales relatives à l’adaptation des programmes nutritionnels dans le contexte de pandémie actuel. Cette adaptation a notamment concerné la première phase de la campagne intégrée de supplémentation en vitamine A (VAS R1), menée en 2020 (encadré 1). La section Nutrition du bureau de l’UNICEF à Cox’s Bazar a dirigé la préparation de la VAS R1, facilité sa mise en œuvre et établi les rapports finaux. L’ensemble des membres des groupes de travail thématiques a appuyé sa réalisation sur le terrain2.

Encadré 1 : Mesures de prévention de la COVID-19 introduites dans la campagne de supplémentation en vitamine A 

  • Recrutement de bénévoles communautaires en nutrition rémunérés issus de la population rohingya, afin d’appuyer les actions menées dans le cadre de la campagne, au lieu de mobiliser des prestataires de services extérieurs
  • Distribution de suppléments en vitamine A aux enfants réalisée à domicile, plutôt qu’en des lieux déterminés, afin d’éviter les grands rassemblements d’enfants et de pourvoyeurs de soins
  • Distanciation physique lors des visites à domicile, entre les bénévoles communautaires en nutrition et les membres des ménages
  • Port obligatoire du masque pour les bénévoles communautaires en nutrition et les membres des ménages
  • Incitation des bénévoles communautaires en nutrition à porter des gants et à se désinfecter régulièrement les mains s’il est impossible d’éviter le contact physique
  • Fourniture de gel hydroalcoolique aux bénévoles communautaires en nutrition pour une bonne hygiène des mains
  • Utilisation d’un ruban de mesure du périmètre brachial par enfant, afin d’éviter le risque de transmission par l’usage répété d’un même ruban.

Les partenaires sectoriels ont accepté de prolonger la durée de la campagne jusqu’à quatre semaines au maximum, en raison du nombre limité de personnel de terrain disponible et pour consacrer plus de temps aux visites à domicile (avec une durée variable selon les camps). La campagne a consisté à distribuer aux enfants des suppléments en vitamine A, à mesurer le périmètre brachial (PB) de chacun d’entre eux, tout en montrant aux mères et aux pourvoyeurs de soins comment se servir d’un ruban de mesure, à recenser les enfants en situation de handicap et à diffuser des messages relatifs à l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant (ANJE) aux femmes enceintes et aux mères d’enfants de moins de deux ans. L’objectif de cette intégration était d’assurer la continuité des services de nutrition essentiels, malgré les restrictions de déplacement. À cette fin, les bénévoles communautaires en nutrition ont eu recours à des modules de formation intégrée, dont un portant sur la méthode appliquée de mesure du périmètre brachial par les mères (ou par les familles) et un autre concernant la diffusion de messages relatifs à l’ANJE visant à promouvoir des pratiques optimales en matière de nutrition maternelle, d’allaitement et d’alimentation complémentaire, en évitant notamment l’utilisation de substituts du lait maternel. Plus de 200 000 rubans ont été imprimés localement pour permettre à chaque famille d’avoir le sien et encourager ainsi la mesure du périmètre brachial par les mères. 

Tout enfant recevant un diagnostic de MAS ou de MAM, conformément aux seuils de périmètre brachial adaptés recommandés par le Cluster nutrition global (MAS : PB < 120 mm et MAM : 120 mm ≤ PB < 135 mm ; référence : Cluster nutrition global, 2020) a été orienté vers le centre de soins nutritionnels intégré le plus proche pour être pris en charge. Les enfants en situation de handicap ont été recensés à l’aide d’un questionnaire simple rempli avec la personne pourvoyeuse de soins, destiné à dépister et à orienter les enfants en vue d’une évaluation plus approfondie. Ce questionnaire a été élaboré d’après le document intitulé « Guidance on strengthening disability inclusion in Humanitarian Response Plans » (Lignes directrices pour le renforcement de l’inclusion du handicap dans les plans d’intervention humanitaire) du Ministère britannique du développement international (DFID), une version simplifiée des critères de Washington et d’autres recommandations relatives au dépistage du handicap. Des spécialistes du handicap issus du Programme alimentaire mondial (PAM) et des experts en protection de l’enfance du bureau de l’UNICEF à Cox’s Bazar ont fourni un soutien technique, en interrogeant notamment les mères sur leurs éventuelles préoccupations au sujet d’un handicap chez leur enfant. Les enfants recensés comme porteurs d’un handicap ont été orientés vers les services compétents disponibles (assurés, par exemple, par Handicap International).

Plus de 800 bénévoles communautaires en nutrition ont été mobilisés dans le cadre de la campagne de supplémentation en vitamine A. Ils ont été recrutés par l’UNICEF, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et le PAM, partenaires du programme, et rémunérés selon des taux standardisés préalablement convenus, fixés par le Commissaire à l’aide aux réfugiés et au rapatriement (RRRC) et le Groupe de coordination intersectorielle (ISCG). Ces bénévoles maîtrisaient tous suffisamment la lecture et l’écriture pour remplir les documents d’inscription, et possédaient une certaine expérience de l’appui aux activités humanitaires menées dans les camps. Ils ont suivi une formation intensive à l’aide de supports adaptés au contexte de la COVID-19. Ainsi, les formateurs ont été formés à distance, au moyen d’une plateforme de communication en ligne. Ils ont ensuite eux-mêmes formé les bénévoles rohingya en présentiel par petits groupes, en respectant la distanciation physique entre les participants.

Les procédures suivies durant la campagne sont décrites dans l’encadré 2. Toutes les équipes de bénévoles en nutrition de la communauté rohingya ont reçu des stocks de suppléments en vitamine A, des rubans de mesure, des dépliants porteurs de messages relatifs à l’ANJE destinés aux pourvoyeurs de soins, des fiches d’enregistrement des données, des masques, des gants et du gel hydroalcoolique. Tout au long de la formation, les comportements préventifs à l’égard de la COVID-19 leur ont été rappelés, notamment l’utilisation régulière de gel hydroalcoolique, le port de masques et le respect de la distanciation physique. Les bénévoles communautaires en nutrition n’ont pas été régulièrement soumis à des tests de dépistage de la COVID-19. Cependant, ceux qui ressentaient des symptômes de la maladie devaient le signaler à un établissement de santé du secteur et s’isoler.

Encadré 2 : Procédures suivies par les bénévoles communautaires en nutrition durant la campagne de porte-à-porte de supplémentation en vitamine A

  • Les bénévoles communautaires en nutrition se présentent au ménage, expliquent le principe de la campagne de supplémentation en vitamine A et obtiennent un consentement éclairé avant d’entrer dans le foyer.
  • Les bénévoles communautaires en nutrition recensent tous les enfants de moins de cinq ans composant le ménage, déterminent la dose de vitamine A nécessaire en fonction de l’âge de chaque enfant et leur administrent la supplémentation.
  • Les bénévoles communautaires en nutrition guident et supervisent la mère ou la personne pourvoyeuse de soins dans la mesure du périmètre brachial de chaque enfant de moins de cinq ans.
  • Les bénévoles communautaires en nutrition guident et supervisent la mère ou la personne pourvoyeuse de soins dans la recherche de tout autre signe de malnutrition chez l’enfant, tel que l’œdème bilatéral.
  • Les bénévoles communautaires en nutrition observent l’enfant afin de détecter tout signe de handicap physique et interrogent la mère ou la personne pourvoyeuse de soins sur sa connaissance d’un éventuel handicap, y compris d’un handicap mental. 
  • Les bénévoles communautaires en nutrition consignent toutes les données obtenues. 
  • Les bénévoles communautaires en nutrition expliquent à la mère ou à la personne pourvoyeuse de soins les étapes à suivre si les mesures du périmètre brachial et/ou la recherche d’autres signes de malnutrition révèlent une MAM ou une MAS.
  • Les bénévoles communautaires en nutrition délivrent des messages relatifs à l’ANJE adaptés à l’âge des enfants sur les pratiques optimales en matière de nutrition néonatale, infantile et maternelle.
  • Les bénévoles communautaires en nutrition remercient la mère ou la personne pourvoyeuse de soins.

Chaque soir, les équipes soumettaient des comptes rendus à leurs organismes respectifs. Le Secteur nutrition et les responsables de la gestion de l’information au sein de l’UNICEF rassemblaient ensuite les données et les analysaient en regard des objectifs de couverture de la supplémentation en vitamine A.Si un cas de COVID-19 était enregistré dans la zone d’un camp durant la campagne de supplémentation en vitamine A, l’intégralité du quartier était placée en quarantaine. Les fonctionnaires bangladais extérieurs aux camps étaient examinés à leur arrivée pour détecter d’éventuels signes et symptômes de la COVID-19, avant d’être autorisés à pénétrer dans la zone où se trouve le camp. En présence de symptômes, le cas était signalé et l’individu isolé et soumis à un test de dépistage. Ces mesures ont été essentielles pour réduire le risque de transmission de la COVID-19 durant la campagne.

Résultats

Mise en œuvre pendant quatre semaines, la campagne de supplémentation en vitamine A a permis d’atteindre un total de 155 219 enfants âgés de 6 à 59 mois sur les 160 026 ciblés (soit 97 %). Tous ces enfants ont bénéficié de l’ensemble intégré d’interventions (suppléments en vitamine A, dépistage de la malnutrition aiguë et messages relatifs à l’ANJE adaptés à l’âge). D’après les rapports de suivi sur le terrain établis par CARE International (partenaire technique de l’UNICEF), les personnes pourvoyeuses de soins aux enfants de moins de cinq ans ont largement adhéré à la campagne.

Tableau 1 Dépistage de la malnutrition aiguë sévère (MAS), de la malnutrition aiguë modérée (MAM) et de la malnutrition aiguë globale (MAG) par tranches d’âge, dans le cadre de la VAS R1 2020

Tranche d’âge (en mois)

Nombre d’enfants de moins de cinq ans dépistés

Nombre d’enfants atteints de MAS

Nombre d’enfants atteints de MAM

Nombre d’enfants atteints de MAG

Prévalence de la MAS par tranche d’âge

Prévalence de la MAM par tranche d’âge

06-11

15 316

909

3588

4497

5,93 %

23,43 %

12-23

31 585

1236

8063

9299

3,91 %

25,53 %

24-59

108 318

431

7262

7693

0,40 %

6,70 %

Total

155 219

2576

18 913

21 489

3,42 %

18,55 %

Prévalence totale

 

1,66 %

12,18 %

13,84 %

 

Le tableau 1 montre la prévalence moyenne globale, par tranche d’âge, de la MAS et de la MAM chez les enfants dépistés, calculée à l’aide des seuils de périmètre brachial adaptés. La prévalence totale de la MAS et de la MAM chez les enfants de moins de cinq ans était respectivement de 1,66 et 12,18 % ; celle de la malnutrition aiguë globale (MAG) était de 13,84 %. L’analyse de la prévalence de la MAS par tranche d’âge a révélé que les tranches d’âge avec les taux de MAS les plus élevés (5,93 % chez les 6 à 11 mois ; et 3,91 % chez les 12 à 23 mois) étaient aussi celles avec les plus forts taux de MAG. Les résultats montrent que les enfants se situant dans ces tranches d’âge sont plus vulnérables à la malnutrition aiguë que les enfants âgés de 24 à 59 mois. Par ailleurs, différents types de handicaps ont été détectés durant la campagne chez 132 enfants de moins de cinq ans, les plus touchés appartenant à la tranche d’âge des 6 à 11 mois. Ce fait peut s’expliquer par la présence d’un plus grand nombre de formes congénitales de handicap dans la tranche d’âge la plus jeune. Si l’état nutritionnel de ces enfants handicapés n’est pas connu, il mérite une analyse approfondie, ce groupe étant particulièrement exposé au risque de malnutrition.

Discussion

L’intégration du dépistage des enfants âgés de 6 à 59 mois par la mesure du périmètre brachial à la campagne de supplémentation en vitamine A a permis de recenser quelque 21 489 enfants atteints de MAS ou de MAM, au moyen de seuils de périmètre brachial ajustés (inférieurs à 120 mm ou à 135 mm, respectivement). Cette expérience démontre que les campagnes de ce type forment un cadre tout indiqué pour la prestation de services de nutrition communautaires, lequel pourrait être envisagé à l’avenir.

La constatation d’une prévalence plus importante de la MAS et de la MAM chez les enfants âgés de 6 à 23 mois confirme à nouveau qu’au sein des camps de réfugiés rohingya, la petite enfance est une période vulnérable. Il est essentiel de veiller à ce que les enfants et les personnes leur dispensant des soins aient accès aux services de prévention de l’émaciation, notamment les services de nutrition maternelle, qui permettent de prévenir l’insuffisance pondérale à la naissance et l’anémie et de fournir une aide à l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant.

Le nombre de cas d’infection à la COVID-19 communiqué par le secteur de la santé n’a pas augmenté après la campagne de supplémentation en vitamine A. Cela laisse entendre que, bien que de nombreux facteurs entrent en ligne de compte, il est possible de mettre en œuvre les phases ultérieures de la campagne en toute sécurité durant la pandémie, en s’appuyant sur les stratégies adaptées et les mesures de prévention et de contrôle des infections. Les enseignements tirés de la campagne intégrée de supplémentation en vitamine A seront appliqués dans la prochaine phase de la campagne, qui doit débuter en novembre ou décembre 2020.

Les partenaires sectoriels ont conscience du fait que l’adaptation des seuils de périmètre brachial recommandés par le Cluster nutrition global au contexte de la COVID-19 a fait augmenter les taux de référencement nutritionnel et a particulièrement influé sur les programmes d'alimentation supplémentaire ciblés3. Cette situation est étroitement suivie et des décisions seront prises pour pérenniser la couverture élevée des services de nutrition essentiels.

Conclusion

Les expériences menées dans le district de Cox’s Bazar ont montré qu’il est possible de réaliser une campagne de supplémentation en vitamine A efficacement et en toute sécurité durant la pandémie de COVID-19, en adoptant des approches adaptées, notamment les visites en porte-à-porte en lieu et place des grands rassemblements. Le recours à des bénévoles communautaires en nutrition recrutés localement au sein des communautés rohingya (plutôt qu’à des bénévoles bangladais, comme c’est généralement le cas) pour mener à bien la campagne a réduit le risque de transmission de la COVID-19 depuis l’extérieur des camps. En août 2020, 55 560 enfants issus des communautés d’accueil avaient été dépistés, de même que 169 997 enfants dans les camps de réfugiés rohingya, soit des chiffres supérieurs aux niveaux de couverture antérieurs à la pandémie (source : rapports 4W mensuels). Le fait que la campagne ait permis d’atteindre plus de 97 % des enfants âgés de 6 à 59 mois prouve que, malgré les mesures de confinement, il est possible de toucher un grand nombre d’enfants grâce à une stratégie solidement planifiée et mise en œuvre.

L’expérience révèle également que le dépistage de la malnutrition aiguë peut être efficacement associé à la supplémentation en vitamine A, la tranche d’âge ciblée étant identique. Les enfants recensés durant la campagne comme étant atteints de MAS ou de MAM ont pu être orientés vers le programme nutritionnel pertinent (programme de traitement ambulatoire ou de supplémentation alimentaire ciblé), au titre du programme nutritionnel intégré. Toutefois, l’adaptation des seuils de périmètre brachial a eu des conséquences sur le nombre de cas recensés, lesquelles font actuellement l’objet d’une analyse et d’un examen approfondis par le Secteur nutrition, dans le cadre de la stratégie de lutte contre la COVID-19. Les enfants en situation de handicap ont été orientés vers les services habilités à répondre à leurs besoins spécifiques, illustrant ainsi la possibilité et les avantages d’associer la nutrition aux programmes et aux secteurs connexes. Enfin, les résultats du dépistage mettent en évidence la vulnérabilité de la population face à la malnutrition aiguë, ainsi que la nécessité d’améliorer la nutrition maternelle et d’encourager un allaitement maternel et une alimentation complémentaire sûrs et appropriés, afin de prévenir l’émaciation chez les nourrissons et les jeunes enfants.

 

Pour en savoir plus, veuillez contacter Bakhodir Rahimov à l’adresse : brahimov@unicef.org   


1 Pour de plus amples informations, consultez l’article de terrain publié dans le présent numéro, intitulé « Adaptation des programmes de PCMA dans le district de Cox’s Bazar face à la pandémie de COVID-19 ».

2 Les groupes de travail techniques sont composés de représentants des Nations Unies (HCR, UNICEF, PAM) et d’autres organisations (Action contre la Faim, Care International, Concern Worldwide, World Concern, Save the Children International, Social Assistance and Rehabilitation for the Physically Vulnerable/SARPV, Society for Health Extension and Development/SHED et World Vision International/WVI).

3 Pour de plus amples informations, veuillez consulter un article de terrain publié dans le présent numéro, intitulé « Adaptation des programmes de PCMA dans le district de Cox’s Bazar face à la pandémie de COVID-19 », ainsi qu’un article de recherche intitulé « Concordance entre le score z du poids-pour-taille et le périmètre brachial pour le dépistage de l’émaciation chez les enfants au Bangladesh ».


Références

Ministère britannique du développement international (DFID) (2019). Guidance on strengthening disability inclusion in Humanitarian Response Plans. Guidance on strengthening disability inclusion in Humanitarian Response Plans, Humanitarian Needs Overview.

Essential and Critical Programmes (2020). Numéro du 22 mars 2020. « Rohingya refugee camp operations: essential and critical programmes in light of COVID-19. »

Nutrition Sector (2020) « Interim Nutrition Sector Technical Guidance in Context of COVID-19. »  Numéro du 27 avril 2020, Cox’s Bazar, Bangladesh, Cluster nutrition global (2020), « Interim Nutrition Sector Technical Guidelines in the context of COVID-19 ».

UNICEF (2020). « Vitamin A (VAS) Round 1 Dashboard Analytics. » VAS R1 2020 Dashboard.

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