Intensification des interventions nutritionnelles en matière de soins prénatals au Burkina Faso
Cet article résume l’étude suivante : Kim S, Zagré R, Ouédraogo C, et al (2023) Intensified nutrition interventions in antenatal care services increased consumption of iron and folic acid supplements and early breastfeeding practices in Burkina Faso: Results of a cluster-randomized program evaluation. The Journal of Nutrition. https://doi.org/10.1016/j.tjnut.2023.06.016
Bien que les femmes enceintes au Burkina Faso aient vu leur accès aux soins prénatals et aux suppléments en fer et acide folique s’améliorer, les données probantes concernant l’intégration et la qualité des interventions nutritionnelles dans les services de soins prénatals, ainsi que l’utilisation et les effets de ces services, restent limitées.
De 2020 à 2021, Alive & Thrive a aidé le gouvernement du Burkina Faso à améliorer la distribution de suppléments en fer et acide folique et les activités de conseil interpersonnel par l’intermédiaire des services de soins prénatals et des contacts dans les communautés dans deux régions de l’ouest du pays : la Boucle du Mouhoun et les Hauts-Bassins. Dans le cadre du programme d’intensification des interventions nutritionnelles, les activités de conseil ont souligné l’importance d’une participation précoce et régulière aux services de soins prénatals, d’un apport et d’une diversité alimentaires adéquats, du respect de la prise de la supplémentation en fer et acide folique, d’une prise de poids adéquate, de la mise au sein précoce et de la poursuite de l’allaitement maternel exclusif. Une surveillance de routine de la prise de poids a également été mise en place.
Une évaluation randomisée par grappes avec enquêtes transversales sur la situation initiale (2019, n = 2880) et finale (2021, n = 2880) menée auprès de femmes enceintes et de femmes ayant récemment accouché a estimé les effets des interventions nutritionnelles intensifiées pendant les soins prénatals (par rapport aux soins prénatals classiques) sur la couverture des interventions et les pratiques de nutrition maternelle. Les femmes des zones d’intervention et des zones témoins présentaient des caractéristiques démographiques et socioéconomiques analogues. Leur âge moyen était de 27 ans. La plupart étaient mariées et avaient déjà connu au moins une grossesse. Plus de 60 % n’étaient jamais allées à l’école et environ 60 % vivaient dans des ménages en situation de sécurité alimentaire.
Les résultats de l’évaluation ont mis en évidence des améliorations de la couverture des visites prénatales, les femmes des zones d’intervention étant plus susceptibles d’assister à leur première visite prénatale au cours du premier trimestre et d’assister à au moins quatre visites pendant leur grossesse que celles des zones témoins. Les effets sur la couverture des contacts communautaires ont été particulièrement notables : la part de femmes ayant bénéficié de visites à domicile a augmenté de 35 % et celle de femmes participant à des réunions communautaires a augmenté de 27 %. En outre, les femmes des zones d’intervention ont été plus nombreuses à recevoir des conseils nutritionnels, ont fait mesurer leur poids plus fréquemment et ont déclaré avoir disposé de comprimés de fer et d’acide folique en quantité suffisante pendant leur grossesse.
Les effets sur les pratiques des femmes ont été plus mitigés. Les femmes des zones d’intervention ont consommé en moyenne 21 comprimés de fer et d’acide folique de plus que les femmes des zones témoins, bien que le pourcentage de femmes ayant consommé au moins 180 comprimés de fer et d’acide folique pendant la grossesse soit resté faible dans l’ensemble. L’intensification des interventions nutritionnelles n’a eu aucun effet sur l’alimentation des femmes, la diversité alimentaire restant faible dans les zones d’intervention et les zones témoins. Dans les zones d’intervention, on a toutefois observé des effets considérables sur la mise au sein précoce et l’allaitement maternel exclusif.
Dans l’ensemble, cette étude illustre la manière dont les interventions nutritionnelles peuvent être renforcées dans le cadre des services de soins prénatals fournis par le gouvernement, les améliorations étant particulièrement notables en matière de couverture des services, de conseil nutritionnel et de respect des pratiques de supplémentation en fer et en acide folique et d’allaitement. L’absence d’effet sur les pratiques alimentaires des femmes doit cependant interpeller. Comme le soulignent les auteurs, des facteurs contextuels tels que le niveau d’insécurité alimentaire des ménages, les normes sociales et le soutien familial peuvent y contribuer et devraient être pris en compte dans les futures initiatives d’amélioration du régime alimentaire des femmes. Enfin, bien que les auteurs confirment que l’intégration du programme d’intensification des interventions nutritionnelles dans les systèmes et services de santé existants était réalisable, la possibilité de passer à l’échelle un tel modèle au-delà du contexte de l’étude doit faire l’objet de recherches plus approfondies.