Facteurs de risque modifiables du retard de croissance chez l’enfant en Afrique subsaharienne
Cet article résume l’étude suivante : K. Ahmed, A. Dadi, F. Ogbo et al. (2023) Population-modifiable risk factors associated with childhood stunting in sub-Saharan Africa. JAMA Network Open, 6, 10. https://jamanetwork.com/journals/jamanetworkopen/fullarticle/2810821
Les auteurs ont utilisé les données d’enquêtes démographiques et de santé menées dans 25 pays d’Afrique subsaharienne entre 2014 et 2021 pour étudier 145 900 enfants âgés de moins de cinq ans. L’objectif de leur étude transversale était de déterminer les facteurs de risque modifiables associés au retard de croissance chez l’enfant. Conformément aux normes établies pour les enquêtes démographique et de santé en matière de collecte de données et d’outils, les mêmes données avaient été collectées au moyen du même type d’enquête dans chacun des 25 pays. Les femmes interrogées devaient être âgées de 15 à 49 ans et constituer un membre permanent du ménage étudié, ou y avoir dormi la veille.
Les auteurs se sont principalement intéressés au retard de croissance (-2 écarts types) et au retard de croissance sévère (-3 écarts types), qu’ils ont mesurés selon les valeurs de z du rapport taille-pour-âge de l’Organisation Mondiale de la Santé. Ils ont étudié des facteurs de risque modifiables liés à l’enfant, à la mère et au ménage. L’étude indique les risques relatifs à la présence de chaque facteur de risque, calculés en contrôlant pour les variables confondantes. Les auteurs ont également déterminé les fractions attribuables dans la population (la réduction proportionnelle du retard de croissance qu’entraînerait une moindre exposition aux facteurs de risque), que le présent résumé reprend. Les risques relatifs, qu’il pourrait être plus facile d’interpréter pour certains lecteurs, sont détaillés dans l’article des auteurs de l’étude.
Parmi les enfants étudiés, 15,1 % ont eu des épisodes de diarrhée (≥ 3 épisodes par jour) au cours des deux semaines précédant l’enquête et environ 84,6 % n’ont pas consommé de produits laitiers au cours des dernières 24 heures. Les mères sont 39,4 % à ne pas avoir reçu d’éducation formelle et 66,6% sont sans emploi. Plus de la moitié des enfants (55 %) vivent dans des ménages dépourvus de toilettes améliorées et 63,9 % sont nés dans des établissements de santé. La prévalence du retard de croissance, située entre 55,8 % au Burundi et 17,1 % en Gambie, atteint une moyenne générale de 30,6 %. La prévalence du retard de croissance sévère, située entre 24,8 % au Burundi et 3,5 % en Gambie, atteint une moyenne générale de 10,5 %.
Les principaux facteurs de risque de retard de croissance sont le manque de consommation de produits laitiers chez l’enfant (fraction attribuable dans la population : 15,1 %), le fait que les mères n’aient reçu qu’une éducation primaire (fraction attribuable dans la population : 8,1 %), l’utilisation de combustibles de cuisson peu sûrs (fraction attribuable dans la population : 9,5 %) et le fait que le ménage ait un faible niveau de revenu (fraction attribuable dans la population : 5,4 %). Une fois combinés, ces quatre facteurs de risque sont associés à 40,7 % (IC à 95 % : [34,0 ; 47,2]) des cas de retard de croissance.
« Les fractions attribuables dans la population combinées montrent que 51,6 % (IC à 95 % : [40,5 ; 60,9]) des cas de retard de croissance sévère chez l’enfant en Afrique subsaharienne étaient associés à l’absence d’éducation formelle chez la mère, au manque de produits laitiers dans l’alimentation de l’enfant, à l’utilisation de combustibles de cuisson peu sûrs, à l’accouchement au domicile et au fait que le ménage ait un faible niveau de revenu. ». – Ahmed et al., 2023
Les auteurs relèvent qu’ils sont peut-être les premiers à utiliser le concept de fractions attribuables dans la population pour estime le retard de croissance chez l’enfant en Afrique subsaharienne. Leur étude donne une idée claire de ce que les interventions devraient cibler pour un maximum d’efficacité. Certains facteurs de risque apparaissent clairement produire un effet « démesuré » sur le retard de croissance chez l’enfant. Il convient donc de les traiter en priorité lorsque les ressources financières sont limitées. L’utilisation de données d’enquêtes démographiques et de santé représentatives de la population nationale permet de généraliser les résultats à toute la région avec plus de fiabilité. Cependant, la collecte de données locales plus précises fournit toujours une image plus nuancée. Il n’en reste pas moins que cette étude à grande échelle constitue un bon point de départ qui mérite l’attention des responsables politiques et des concepteurs de programmes.