Adaptation au changement climatique et atténuation de ses effets sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle au Honduras

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José Lino Pacheco est directeur de l’Unité technique de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, secrétaire de la coordination générale du gouvernement du Honduras et point focal national SUN.

Susan Lopez est spécialiste de la sécurité alimentaire et nutritionnelle au sein de l’unité technique de la sécurité alimentaire et nutritionnelle et secrétaire de la coordination générale du gouvernement du Honduras.

Adriana Hernandez est professeur associée de nutrition humaine et de sécurité alimentaire au ministère des Sciences alimentaires de l’université de Zamorano, au Honduras.

Lucía Escobar est associée au programme de nutrition du Programme alimentaire mondial des Nations unies au Honduras.

Introduction

Le Honduras est un pays d’Amérique centrale qui compte plus de neuf millions d’habitants, répartis en neuf groupes ethniques différents. La famine augmente et on estime qu’elle touche 1,4 million de personnes (2017)1. Près d’un enfant sur cinq (23 %) de moins de cinq ans (EM5) souffre d’un retard de croissance ; dans les zones les plus vulnérables, cette proportion passe à un sur deux2.  Dans le même temps, l’urbanisation rapide entraîne une augmentation de la consommation d’aliments transformés et une baisse de l’activité physique, ce qui contribue à l’augmentation des taux de surcharge pondérale et d’obésité et du risque de maladies non transmissibles (MNT) liées à la nutrition. Environ 51 % des femmes au Honduras sont en surcharge pondérale ou obèses (2012)2.

Un pourcentage élevé de la population vit dans la pauvreté (64 %) et l’extrême pauvreté (40 %), la plupart des personnes extrêmement pauvres vivant dans les zones rurales (69 %)3.  Le Honduras est également très vulnérable au changement climatique4 et se situe dans ce que l’on appelle le « corridor de la sécheresse », une zone particulièrement exposée aux sécheresses irrégulières et prolongées. L’augmentation des effets du climat a donné lieu à de nouveaux défis ; il faut donc renforcer la résilience de la population pour lutter contre la sous-nutrition, la surcharge pondérale et l’obésité et les maladies non transmissibles. 

Politique et plans au Honduras pour faire face au changement climatique

Au Honduras, la principale politique qui vise à aider la population à s’adapter aux effets du changement climatique est le Cadre stratégique de lutte contre le changement climatique. Celui-ci comprend des objectifs en matière d’agriculture, de sols et de sécurité alimentaire, ainsi que l’amélioration de la résilience des cultures et des pâturages au stress thermique et hydrique et la prévention ou la réduction de l’incidence des parasites et des maladies. Parmi les autres objectifs figurent la lutte contre l’érosion des sols, la perte de productivité et la désertification visant à préserver et à améliorer la qualité nutritionnelle des aliments.

Le Plan national d’adaptation au changement climatique (2018-2030), qui est lié à cette politique, donne la priorité à la production agroalimentaire et à la souveraineté alimentaire, ainsi qu’au renforcement des systèmes d’alerte précoce et de gestion des risques liés aux événements naturels extrêmes. Le plan met également l’accent sur l’élargissement des partenariats avec les ministères, le secteur privé, les universités, les agences des Nations unies et les organisations non gouvernementales (ONG) internationales et nationales afin de maximiser les approches intégrées pour accroître la productivité des petits exploitants et la génération de revenus grâce à des systèmes alimentaires plus durables.

Lier les réponses humanitaires et le développement

Dans un contexte de complexité croissante due à la pauvreté, à la sous-nutrition, à l’augmentation de la surcharge pondérale et de l’obésité, aux effets du changement climatique et à un historique de situations d’urgence liées à la sécheresse, le gouvernement et ses partenaires investissent dans des solutions plus durables pour restaurer la base de ressources naturelles, protéger les communautés contre les chocs climatiques et prévoir les événements météorologiques extrêmes. Le renforcement de la résilience et de la capacité d’adaptation des petits exploitants agricoles, dont les rendements sont souvent inférieurs à ceux de tous les autres producteurs alimentaires, est considéré comme essentiel pour prévenir la faim et la malnutrition au Honduras. La pire sécheresse qu’ait connue le pays, en 2014-2016, a nécessité la déclaration d’une situation d’urgence, l’accent étant mis sur l’aide à apporter aux 280 000 familles les plus touchées par la sécheresse par l’intermédiaire du système national de gestion des risques (SINAGER, de ses initiales en espagnol) formé par les agences gouvernementales et le réseau d’aide humanitaire.

Des réservoirs d’eau et un réseau de distribution pour l’irrigation au goutte-à-goutte : les stratégies gouvernementales pour lutter contre la sécheresse

L’Alliance pour le corridor de la sécheresse

En 2014, l’Alliance pour le corridor de la sécheresse (Alianza para el Corredor Seco en espagnol, ou ACS) a été créée dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie nationale de sécurité alimentaire et nutritionnelle (2014-2022) et d’autres stratégies liées au changement climatique. Le programme concentre ses efforts sur la réduction de la pauvreté et de la malnutrition par le biais d’investissements stratégiques dans les communautés vulnérables du corridor de la sécheresse. Cette initiative nationale, soutenue par des bailleurs de fonds internationaux, est coordonnée par l’Unité technique de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, Secrétariat de la coordination générale du gouvernement du Honduras, en collaboration avec les municipalités de la région par l’intermédiaire de leurs comités d’urgence locaux, auxquels participent différents secteurs, des ONG et des groupes organisés locaux.

Les activités de l’ACS comprennent la fourniture d’équipements, d’informations et de connaissances aux petits exploitants, ainsi que de technologies appropriées et de ressources de développement des capacités des organisations d’agriculteurs dans les communautés et les municipalités des 10 départements du corridor de la sécheresse. En raison de la sécheresse qui sévit dans le pays en 2014-2016, le ministère de l’Agriculture et de l’élevage a également entrepris le programme présidentiel de récupération de l’eau, qui prévoit la construction de réservoirs, de conduites d’eau et d’un réseau de distribution pour l’irrigation au goutte à goutte.

Activités de stratification

L’objectif principal de l’ACS est de sortir 50 000 familles de la pauvreté d’ici 2020 et de réduire le retard de croissance de 20 % chez les EM5 dans les communautés cibles (une analyse des données permettant d’atteindre cet objectif est en cours). Les activités ont été élargies pour inclure l’éducation nutritionnelle et l’hygiène à la maison, la production alimentaire et la génération de revenus, la construction de réservoirs d’eau et l’irrigation au goutte-à-goutte, l’assistance technique et la formation des producteurs, l’accès au crédit agricole pour les petits et moyens producteurs, et la prévention des grossesses chez les adolescentes grâce au renforcement des capacités des 10 départements cibles.

L’approche repose également sur la compréhension du fait qu’aucune activité ne suffit à elle seule à faciliter la transformation des petits exploitants, qui passent du statut d’agriculteurs de subsistance, très vulnérables aux chocs et aux stress climatiques, à celui de producteurs de surplus intégrés dans les systèmes de marché locaux et régionaux et résistants aux chocs.

Les activités mises en œuvre sont basées sur les principes suivants :

  • Se concentrer sur les populations les plus vulnérables et souffrant d’insécurité alimentaire
  • Conclure des partenariats efficaces
  • Comprendre, définir et traiter les liens entre les risques climatiques, les risques non climatiques, la nutrition et la sécurité alimentaire
  • Intégrer la restauration de l’environnement et la gestion des ressources naturelles dans les efforts d’adaptation au changement climatique et les stratégies connexes
  • Inclure une perspective de genre, de protection sociale et de nutrition             

Les activités de nutrition comprennent l’éducation à la santé, à l’hygiène et à la nutrition visant à livrer des messages clés pour la promotion d’un mode de vie sain. La diversification des cultures à haute valeur nutritionnelle est également encouragée afin d’augmenter la production et l’accès aux aliments à haute teneur en micronutriments (maïs, haricots et patates douces biofortifiés) pour prévenir la malnutrition due au manque de micronutriments. Nombre de ces activités, y compris la formation et les actions visant à atténuer les effets du changement climatique, sont mises en œuvre au niveau communautaire à l’aide des plateformes existantes. Celles-ci comprennent des associations locales (telles que des groupes de femmes rurales, des logements ruraux, des surveillants de la nutrition des enfants, ou des bénévoles de la santé) et des dirigeants communautaires (tels que des représentants des offices de l’eau, des membres des comités d’urgence locaux, des associations de parents d’élèves, etc.) qui offrent la possibilité de montrer les résultats obtenus à d’autres familles afin d’encourager le changement des cultures et des habitudes alimentaires.

Défis et prochaines étapes

Les fonds destinés à la gestion des bassins fluviaux dans le corridor de la sécheresse sont insuffisants, et il faut donc mener des actions de sensibilisation pour obtenir un financement plus important. Parmi les autres enjeux, citons la nécessité de sensibiliser les parties prenantes et de diffuser les questions relatives au changement climatique et à la gestion intégrée des ressources en eau aux niveaux national et local, ainsi que de renforcer les mécanismes de dialogue entre les acteurs du changement climatique dans les secteurs public et privé. Le manque de données permettant de mesurer l’impact de ces diverses activités liées au changement climatique et, de fait, leur efficacité pour réduire la malnutrition, représente un défi supplémentaire.

Une deuxième phase du programme ACS est prévue, sous réserve d’un octroi de fonds par les partenaires nationaux et externes. Il est également prévu d’intégrer des mesures d’adaptation au changement climatique et d’atténuation de ses effets dans les plans de développement régionaux et municipaux.


1 L’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde (2017). FAO

2 https://globalnutritionreport.org/resources/nutrition-profiles/latin-america-and-caribbean/central-america/honduras/#profile

3 Encuesta Permanente de Hogares de Propósitos Múltiples en Honduras (2017) Instituto Nacional de Estadísticas (INE)

4 Índice de Riesgo Climático Global según (GermanWatch)

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