Appliquer le Compendium d'actions pour la Nutrition : Expériences d’Haïti et de Birmanie
Sansan Myint est coordinatrice REACH1 en Birmanie.
Agnes Solano est une ancienne coordinatrice REACH en Haïti.
Holly D Sedutto est une consultante pour le réseau des Nations Unies pour le Secrétariat SUN/REACH.
Nicolas Bidault est coordinateur d'actions mondiales pour le réseau des Nations Unies pour le Secrétariat SUN/REACH.
Le Compendium des Actions pour la Nutrition (connu sous le nom de CAN) est une ressource développée par le Réseau des Nations Unies pour le Secrétariat SUN/REACH selon un processus participatif qui utilise des experts externes et les agences de l’ONU. Le recueil a été initialement conçu comme une ressource pour les coordinateurs REACH afin de créer un dialogue multisectoriel au niveau des pays, en particulier dans la formulation des politiques liées à la nutrition et à la planification. En raison de la forte demande pour une ressource pratique de ce genre, le public cible a été ensuite étendu pour inclure les points focaux SUN gouvernementaux et d'autres travaillant sur la coordination et la planification multisectorielle dans le secteur de la nutrition.
Des pays ont depuis lors commencé à utiliser le CAN selon leur contexte spécifique. Des expériences d’Haïti et de Birmanie contenues dans cet article donnent un aperçu de comment la CAN a contribué à leur permettre de s’enrôler dans un éventail plus large d'actions multisectorielles liées à la nutrition.
Haïti
REACH en Haïti a utilisé le CAN pour guider les efforts de sensibilisation à la nutrition avec trois groupes d’intervenants distincts : des membres du gouvernement, des partenaires de développement et des journalistes. Ceci comprenait le développement des outils de communication adaptés à Haïti articulant les liens entre la situation nutritionnelle dans le pays et des interventions soutenues par différents secteurs à Haïti. L’outil (un livret contenant des sections sur la malnutrition et différents secteurs, comme l'agriculture, l’EAH et l'éducation) visait à démystifier ces liens et à les présenter dans un langage simple. Cela a été partagé avec les membres du gouvernement dans les ministères liés à la nutrition et avec les partenaires du développement lors de réunions. Plusieurs personnes interrogées dans une évaluation2 par pays ont estimé que les facilitateurs REACH avaient contribué à la sensibilisation à la nutrition et à sa dimension multisectorielle par le biais de la brochure.
L’outil a été également diffusé au cours d’un atelier de sensibilisation organisé pour environ 40 journalistes et étudiants à l’Université de Quisqueya. Dans l’évaluation après l’atelier, les journalistes ont déclaré que les données statistiques et géographiques fournies leur donneraient les moyens de devenir des professionnels davantage « scientifiques » et d’être plus à l’aise dans la rédaction de sujets liés à la nourriture et à la nutrition. La couverture médiatique correspondante comprenait trois émissions de TV sur la sécurité alimentaire et la nutrition, en compagnie de membres du gouvernement, notamment le Ministre de la santé, des membres de l'équipe du Premier ministre et le Maire de Cité Soleil, une zone urbaine où l’insécurité alimentaire s’est avérée particulièrement élevée.
REACH travaillait déjà activement avec des membres du gouvernement et des partenaires de développement pour aider à utiliser une approche multisectorielle pour traiter la malnutrition, mais cela était la première fois que des collègues de REACH communiquaient avec des journalistes sur le sujet. Cette expérience montre comment le CAN peut être un véhicule efficace pour aider à mobiliser les autres acteurs moins « conventionnels » de la nutrition qui travaillent au niveau des pays.
Birmanie
Le CAN a été tout d'abord appliqué à la Birmanie pour préparer le terrain pour un bilan nutritionnel complet, dirigé par le Gouvernement de la Birmanie avec le soutien de REACH. L'exercice impliquait des acteurs oeuvrant ensemble pour une réunion de plusieurs parties prenantes SUN pour prioriser et hiérarchiser les actions nutritionnelles les plus pertinentes pour le pays et son contexte particulier. L’atelier du bilan comprenait 54 participants des réseaux de SUN, y compris des représentants de cinq ministères. La tendance naturelle (contrairement à beaucoup d’autres pays) était initialement pour les acteurs de graviter vers des actions spécifiques à la nutrition mises en oeuvre par le biais du système de santé, mais il a été reconnu qu'il ne s'agissait que d'une partie de l'iceberg et que les actions sensibles à la nutrition sont également nécessaires.
Le CAN a servi comme une ressource essentielle pour aider à orienter les processus de sélection des actions nutritionnelles de base pour le pays afin qu’un plus grand équilibre multisectoriel s'y reflète. Par exemple, des actions de mesures de « sensibilisation » de la protection sociale à la nutrition des activités liées à l'agriculture qui soient sensibles à la nutrition, comme la diversification des cultures. La carte des options possibles présentées dans le compendium a été utile pour s’assurer que la prise d’inventaire englobe tous les secteurs liés à la nutrition. En outre, la classification de données probantes réalisée dans le CAN a été un « révélateur » pour le dialogue avec les praticiens techniques provenant d’autres secteurs et comme un moyen pour favoriser un consensus parmi les divers acteurs de la nutrition. En fin de compte, cela a aidé les acteurs du pays à utiliser un processus d’établissement de priorités axé sur les éléments de preuve.
L’étape suivante est pour le même groupe multisectoriel de développer le Plan d’Action National multisectoriel pour la Nutrition du Ministère birman (MS-NPAN : 2018-2022), dont la date d'achèvement est prévue pour la fin février 2018. Le CAN est l’une des quatre références-clé à être utilisé et est susceptible d’aider à accélérer les travaux d’élaboration du Nouveau Plan.
« Quand j’ai été invité à cet atelier sur la nutrition, je n’ai pas tout-à-fait compris pourquoi. Je pensais qu’il s’agissait de dossiers gérés par les professionnels de la santé et que je n’avais rien à dire lors de cette réunion. [Mais] nous avons constaté que dans le chapitre "Agriculture" [de CAN], le bétail, que nous fournissions aux petits agriculteurs faisait partie de ce qu’ils appelaient une activité sensible à la nutrition. Cela signifie que notre travail de bétail n'était pas si éloigné du travail de nutrition des sages-femmes et infirmières qui sont présentes dans les communautés. Sachant cela, nous avons eu l’élan nécessaire pour étendre nos activités, maintenant que nous savons que nous faisons une diff érence. »
May Win Shwe, Deputy Director, Livestock Department, Ministry of Agriculture, Livestock and Irrigation (MOALI)
1REACH (Renewed Efforts Against Child Hunger and undernutrition) est une initiative conjointe de l’ONU, de la FAO, de l'UNICEF, du PAM, de l'OMS et de la FIDA qui facilite la création et l’amélioration des mécanismes de coordination menés au niveau des pays et les dialogues participatifs et multisectoriels pour mettre en oeuvre des priorités d’action dans le domaine de la nutrition.
2Mokbel Genequand M, 2017. Evaluation thématique – fin de l’évaluation à terme ; Renewed Efforts Against Child Hunger and undernutrition (REACH) – Haïti Rapport sur les études de cas. évaluations décentralisées. Genéve