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L’analyse de situation comme première étape pour améliorer l’alimentation des jeunes enfants : l’exemple de l’Éthiopie, de la Tanzanie et du Zimbabwe

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Messages clés :

  • Effectuer une analyse du contexte est essentiel pour comprendre ce qui empêche les personnes s’occupant de jeunes enfants de les nourrir au mieux.
  • En Éthiopie et en Tanzanie, combiner une telle analyse au cadre d’action de l’UNICEF a servi à définir des mesures sectorielles stratégiques au niveau national ainsi qu’à renforcer l’engagement des pouvoirs publics à améliorer l’alimentation des jeunes enfants et à réviser leurs politiques à cette fin.
  • Au Zimbabwe, l’analyse du contexte et l’adoption d’une approche systémique ont permis d’adapter les interventions menées au titre d’un programme intégré de nutrition et de résilience, dont la réussite est largement due à un leadership solide des pouvoirs publics au niveau infranational.

Introduction

Dans le cadre d’un programme d’amélioration de la qualité de l’alimentation en période d’alimentation de complément, dix pays de l’Afrique de l’Est et australe ont entrepris une analyse approfondie de la situation à l’échelle nationale entre 2018 et 2019, dont les résultats ont permis d’éclairer une analyse contextuelle de plus grande envergure en vue de comprendre les facteurs favorables et les obstacles à l’amélioration des régimes alimentaires des jeunes enfants et d’en tirer des enseignements clés.

Dans l’ensemble de la région, les analyses menées au niveau des pays ont ainsi pu déterminer ce qui empêche les personnes s’occupant de jeunes enfants de leur fournir un régime alimentaire optimal afin qu’ils réalisent leur plein potentiel en matière de croissance et de développement. C’est sur cette base que le cadre d’action pour améliorer l’alimentation des enfants âgés de 6 à 23 mois pendant la période d’alimentation de complément a été ajusté et adapté au contexte de chaque pays.

Le présent article illustre le processus d’analyse et ses résultats grâce à des exemples tirés de trois pays (l’Éthiopie, la Tanzanie et le Zimbabwe), et explique clairement les mesures que l’analyse de situation permet d’appliquer dans la pratique.

Processus d’analyse

L’analyse de situation a commencé par un atelier de consultation dans chaque pays. Sous la direction des ministères compétents (Santé, Nutrition, Agriculture et Eau), des représentants d’un large éventail d’organismes, d’organisations de la société civile, d’organisations non gouvernementales internationales et du milieu universitaire se sont réunis pour discuter du cadre d’action proposé dans les directives de programmation (UNICEF, 2020).

Pendant plusieurs jours, les participants à l’atelier organisé dans chaque pays ont mené une série de discussions thématiques et sectorielles sur l’état actuel du régime alimentaire des jeunes enfants dans leurs contextes respectifs, sur la base d’analyses de situation antérieures ayant défini les facteurs favorables et les obstacles à l’alimentation optimale des jeunes enfants. À la suite de ces discussions, les participants ont déterminé des mesures stratégiques à prendre à différents niveaux dans les secteurs de la santé, de l’alimentation, de la protection sociale, ainsi que de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène (EAH), adaptant ainsi le cadre d’action au contexte de leur pays.

Au terme de ce processus, chaque pays a mis en œuvre les mesures convenues dans le cadre d’une approche systémique et a procédé au renforcement de la résilience des communautés face à l’instabilité, notamment due au déclenchement de la pandémie de COVID-19 dans un contexte déjà fortement marqué par la pauvreté. Les sections suivantes décrivent les principaux résultats du processus d’analyse en Éthiopie, en Tanzanie et au Zimbabwe.

Synthèse pour chaque pays

Éthiopie

Nardos Birru est une spécialiste de la nutrition au sein du bureau l’UNICEF en Éthiopie.

Charity Zvandaziva est une spécialiste de la nutrition chargée de la nutrition de la mère, du nourrisson et de l’enfant au sein du bureau régional de l’UNICEF pour l’Afrique de l’Est et australe.

Hiwot Darsene est la coordonnatrice du programme national de nutrition au sein du ministère de la Santé de l’Éthiopie.

Arnaud Laillou est un spécialiste régional de la nutrition au sein du bureau régional de l’UNICEF pour l’Afrique de l’Ouest et centrale.

Ramadhani Abdallah Noor est un responsable de la nutrition au sein du bureau de l’UNICEF en Éthiopie.

Stanley Chitekwe est le directeur de la nutrition au sein du bureau de l’UNICEF en Éthiopie.

 

Nous souhaitons remercier le ministère de la Santé de l’Éthiopie et tous les participants, y compris les administrations sectorielles, les partenaires et les acteurs du milieu universitaire pour leur engagement et leur contribution à l’élaboration d’un cadre d’action en faveur de l’alimentation des enfants en Éthiopie. Nous remercions GAIN pour avoir travaillé avec l’UNICEF dans le cadre du processus d’adaptation au contexte. Nous souhaitons également exprimer notre gratitude envers le bureau des Affaires étrangères, du Commonwealth et du Développement (FCDO) pour son soutien financier.

Résultats de l’analyse contextuelle sur les régimes alimentaires des enfants

L’équipe chargée de l’analyse contextuelle a examiné en quoi les stratégies et les politiques nationales relatives aux secteurs de la santé, de l’agriculture, de la protection sociale et de l’EAH favorisaient différents aspects de l’alimentation de complément. Elle a également déterminé les pistes et les bonnes pratiques en vue d’améliorer l’alimentation des enfants au cours de cette période. D’après les résultats de l’examen, l’alimentation des jeunes enfants n’est que peu, voire pas du tout, mentionnée dans les stratégies et les politiques de ces quatre secteurs.

L’un des principaux obstacles à l’adoption par les mères de pratiques d’alimentation de complément adaptées à l’âge de l’enfant était la difficulté d’accès à des aliments sûrs et nutritifs en raison d’une pauvreté absolue, d’un manque de pouvoir d’achat au niveau des ménages et de la diversité réduite des aliments disponibles à la vente dans les zones pastorales, éloignées ou sujettes à la sécheresse.

Une étude récente montre que si l’Éthiopie a enregistré une augmentation de la production totale de nourriture entre 2011 et 2015, celle-ci était principalement due à l’expansion du secteur céréalier au détriment d’autres groupes d’aliments, ce qui a entraîné une réduction de la diversité des produits (Baye et al., 2019). Le manque de technologies de transformation des aliments et la fragmentation des chaînes d’approvisionnement limitent d’autant plus la variété d’aliments disponibles pour les enfants âgés de 6 à 23 mois. Une analyse Fill the Nutrient Gap (« Combler le déficit en nutriments »)1 réalisée par le Programme alimentaire mondial (PAM) montre que satisfaire les besoins en nutriments des enfants de ce groupe d’âge est quatre fois plus cher que de simplement répondre à leurs besoins en énergie, ce qui souligne de nouveau la nécessité d’adopter des stratégies et des mesures destinées à renforcer le pouvoir d’achat des ménages, ainsi qu’à améliorer la disponibilité et le caractère abordable d’aliments nutritifs. La diffusion de messages clés sur les pratiques d’alimentation à adopter en fonction de l’âge du jeune enfant ou du nourrisson se heurte également au fait que les personnes s’occupant d’enfants et les communautés manquent de connaissances, leurs croyances religieuses et culturelles venant aggraver la situation (Institut éthiopien de la santé publique et PAM, 2021).

Définition de mesures stratégiques

Après examen de l’analyse contextuelle, les participants à l’atelier de consultation se sont concentrés sur les obstacles et les goulots d’étranglement en ce qui concerne l’alimentation des enfants dans différents contextes et secteurs. Ils ont ensuite défini des mesures stratégiques à appliquer aux niveaux politique et institutionnel dans les quatre secteurs étudiés, conformément au cadre d’action (figure 1).

Figure 1 : Mesures stratégiques pour améliorer l’alimentation des jeunes enfants en Éthiopie

Les participants ont jugé que l’atelier avait favorisé la discussion et des échanges productifs entre les secteurs, ce qu’ils ont considéré comme l’un des résultats positifs du processus d’analyse.

L’une des principales recommandations était de mobiliser les acteurs du secteur privé. Compte tenu de la croissance de la production et de la commercialisation d’aliments de complément industriels dans le pays, les participants ont jugé nécessaire d’améliorer les connaissances et de parvenir à une compréhension commune pour l’ensemble des parties prenantes (notamment les personnes s’occupant d’enfants, les communautés et le secteur privé) en vue d’encourager la production et la consommation d’aliments de complément riches en nutriments. À l’instar des pouvoirs publics, le secteur privé fournit également des services et des produits relatifs à la santé, à l’EAH et à la nutrition. Renforcer les partenariats et collaborer avec les acteurs du secteur privé permettrait de s’assurer que les enfants de 6 à 23 mois bénéficient de produits et de services adaptés.

Les participants ont recommandé d’élaborer des recettes adaptées à chaque contexte pour que les enfants de 6 à 23 mois puissent consommer des aliments abordables, disponibles localement et d’une teneur appropriée en nutriments. En collaboration avec le ministère de la Santé, l’UNICEF a pris l’initiative de répondre à ce besoin, en commençant par effectuer une évaluation sur le terrain pour déterminer les aliments disponibles au niveau local et analyser les habitudes alimentaires des communautés. Les résultats de cette étude serviront à élaborer des recettes pour les régions d’Afar, d’Amhara, de Gambela, d’Oromia, de Sidama, ainsi que la Région des nations, nationalités et peuples du Sud.

Les croyances religieuses et culturelles ont une influence considérable sur les pratiques d’alimentation du nourrisson et du jeune enfant. Il a été démontré qu’améliorer les régimes alimentaires des enfants et les taux d’utilisation des services de nutrition reste difficile tant que les chefs religieux et de clan ainsi que les volontaires communautaires ne participent pas aux programmes de nutrition mis en œuvre. Les participants ont donc estimé qu’il était essentiel de renforcer les connaissances en matière de nutrition de ces membres clés des communautés. L’UNICEF a par conséquent aidé les pouvoirs publics à élaborer des manuels d’information pour les chefs religieux, dont l’approbation est actuellement soumise à examen.

Compte tenu de l’hétérogénéité du pays, l’UNICEF a amorcé l’organisation de consultations similaires au niveau infranational pour comprendre les différents contextes et élaborer des mesures adaptées, en se basant sur l’adaptation à l’échelle nationale du cadre d’action.

Tanzanie

Tuzie Edwin Ndekia est chargée de la nutrition de la petite enfance au sein du bureau de l’UNICEF en Tanzanie.

Charity Zvandaziva est une spécialiste de la nutrition chargée de la nutrition de la mère et de l’enfant au sein du bureau régional de l’UNICEF pour l’Afrique de l’Est et australe.

Patrick Codija est le directeur de la nutrition au sein du bureau de l’UNICEF en Tanzanie.

Kuda Mako-Mushaninga est vice-présidente des affaires scientifiques au sein du Conseil national sur les produits laitiers.

Esther Nkuba est directrice par intérim de l’éducation et de la formation en matière de nutrition au sein du Centre d’alimentation et de nutrition de la Tanzanie.

Ruth Mkopi est une attachée de recherche principale au sein du Centre d’alimentation et de nutrition de la Tanzanie.

Grace Moshi est directrice adjointe par intérim des services de nutrition au ministère de la Santé de la Tanzanie.

 

Les auteurs sont profondément reconnaissants au Global Thematic Fund d’avoir financé des interventions visant à améliorer l’alimentation des jeunes enfants en Tanzanie.

Résultats de l’analyse contextuelle

En 2021, le bureau de l’UNICEF en Tanzanie a entrepris deux analyses après avoir reconnu que l’alimentation des enfants jouait un rôle déterminant dans le manque d’amélioration de la situation en matière de nutrition et ses conséquences sur le capital humain. L’analyse complète des déficiences en matière de nutriments, intitulée Comprehensive Nutrient Gap Assessment2, révèle que les jeunes enfants ne consomment pas suffisamment de fer et de vitamine A au cours de la période d’alimentation de complément et sont également susceptibles de manquer de calcium, de zinc et de vitamine B12 (GAIN et UNICEF, 2021). L’analyse du caractère abordable des régimes alimentaires des enfants (Chilren’s Diet Affordability Analysis) indique quant à elle qu’un grand nombre de ménages ont du mal à se procurer les aliments nutritifs nécessaires pour répondre ne serait-ce qu’à la moitié des besoins journaliers en fer des enfants de 6 à 23 mois (GAIN et UNICEF, 2019). Les aliments les plus abordables recommandés pour pallier les carences en micronutriments dont les jeunes enfants souffrent ou sont susceptibles de souffrir sont notamment le foie de bœuf et de poulet, les petits poissons séchés, la viande de bœuf, les œufs et les légumes verts à feuilles sombres.

Mesures stratégiques et leçons apprises

Grâce à des consultations techniques avec les principales parties prenantes des pouvoirs publics (ministères, services et agences), des partenaires de développement (organismes des Nations Unies et organisations non gouvernementales) et des instituts de recherche affiliés à chaque secteur (santé, alimentation, protection sociale et EAH), les participants ont pu définir des politiques à adopter en priorité et déterminer le rôle de chaque secteur dans l’amélioration des régimes alimentaires des enfants, conformément aux mesures nationales jugées prioritaires au niveau régional. La figure 2 résume les principales mesures prioritaires définies pour chaque secteur.

Figure 2 : Mesures prioritaires pour améliorer l’alimentation des jeunes enfants en Tanzanie

Les mesures prioritaires ont été intégrées à la deuxième édition du plan d’action multisectoriel du pays en faveur de la nutrition (2021/22-2025/26) afin que le cadre d’action pour améliorer l’alimentation des enfants en Tanzanie, une fois adapté, soit traduit en plans et en mesures concrètes. Au cours du Sommet sur la nutrition pour la croissance qui s’est tenu à Tokyo, le Gouvernement de la Tanzanie s’est notamment engagé à améliorer le régime alimentaire des jeunes enfants en prenant des mesures pour faire passer le pourcentage d’enfants qui reçoivent un apport alimentaire minimum acceptable de 30 % à 50 % d’ici 2026. La mise en œuvre de cet engagement sera suivie dans le cadre du plan d’action multisectoriel en faveur de la nutrition.

Les séances d’information organisées à l’échelle des régions et des conseils à destination d’équipes multisectorielles à la suite de l’atelier leur ont permis d’adapter le cadre d’action pour l’alimentation de complément, ainsi que de s’assurer que les mesures convenues ont été intégrées dans les plans et les budgets généraux annuels de chaque secteur. Le système d’information multisectoriel du pays servira à suivre l’application des mesures considérées comme prioritaires dans chaque secteur.

Prochaines étapes

Le cadre d’action adapté sera mis en œuvre au niveau infranational (c’est-à-dire des autorités régionales et locales), l’objectif étant que plus de 90 % des collectivités locales de la Tanzanie (soit 168) élaborent leur propre cadre d’action pour améliorer l’alimentation des jeunes enfants dans leur zone d’intervention d’ici juin 2024.

Le Cabinet du Premier ministre (qui est chargé de la coordination des interventions en matière de nutrition, ainsi que de s’assurer de la redevabilité et de la réactivité de chacun des secteurs) sollicitera les secrétaires permanents des ministères, les directeurs de services et les points focaux en matière de nutrition afin que les mesures prioritaires convenues soient intégrées dans les plans et les budgets des quatre secteurs. Les groupes de travail technique établis pour élaborer le plan d’action multisectoriel en faveur de la nutrition s’assureront également que les plans stratégiques et annuels mis au point dans différents secteurs intègrent les mesures prioritaires convenues.

Un cadre de redevabilité sera mis en place pour suivre et documenter la mise en œuvre des mesures prioritaires à l’échelle nationale et infranationale en tant que partie intégrante du système d’information multisectoriel existant. La collecte, l’analyse et la diffusion de données locales et régionales sur la nutrition ainsi que d’informations connexes reposeront principalement sur un système de suivi et d’évaluation intégré, lequel doit cependant être revu et amélioré afin de rendre compte de l’évolution d’indicateurs relatifs aux autres secteurs essentiels à la mise en œuvre des mesures prioritaires.

Zimbabwe

Dexter Chagwena est consultant en nutrition au sein du bureau de l’UNICEF au Zimbabwe.

Kudzai Mukudoka est spécialiste en nutrition au sein du bureau l’UNICEF au Zimbabwe.

Kingstone Mujeyi est spécialiste des systèmes agricoles et alimentaires au sein de l’université du Zimbabwe.

La présente section rend compte des interventions menées au titre du programme de nutrition et de résilience intitulé Zimbabwe Resilience Building Fund Project (projet de financement du renforcement de la résilience au Zimbabwe, ou ZRBF), que l’UNICEF a mis en œuvre en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et des partenaires. Le projet a été mené sous la direction du ministère des Terres, de l’Agriculture, de la Pêche, de l’Eau, du Climat et du Développement rural, ainsi que du ministère de la Santé et des Soins aux enfants. L’Union européenne en a assuré le financement.

Description du programme

En 2019, une étude contextuelle a été menée dans les 18 districts ciblés par l’UNICEF dans le cadre du projet ZRBF, un programme de nutrition et de résilience destiné à améliorer les pratiques d’alimentation de complément adoptées par les personnes s’occupant de jeunes enfants âgés de 6 à 23 mois. L’analyse contextuelle était composée de deux volets : des travaux de recherche formative et une étude de cas qualitative, réalisée au moyen d’un examen documentaire, d’une analyse des indicateurs de suivi du projet, d’un atelier de formation multipartite et d’une évaluation du processus de mise en œuvre. Les résultats obtenus ont servi à adapter les interventions menées au titre du projet ZRBF pour qu’elles contribuent le plus possible à améliorer l’alimentation des jeunes enfants. Par ailleurs, le cadre d’action pour l’alimentation de complément a été adapté au contexte local conformément à une approche systémique. Les comités multisectoriels chargés de la sécurité nutritionnelle et alimentaire dans les districts, les villages et les autres circonscriptions ont coordonné la mise en œuvre d’interventions intégrées dans les différents secteurs concernés (santé, EAH, éducation, protection sociale et alimentation).

Afin d’encourager les communautés cibles à adopter les pratiques nutritionnelles recommandées, l’UNICEF a mis en œuvre le programme sur le modèle des « groupes de soins ». Ce modèle consiste à établir des plateformes communautaires destinées à promouvoir l’adoption des bonnes pratiques et de comportements connexes en matière d’alimentation de complément. Sept comportements clés ont été mis en avant afin de favoriser l’adoption de bonnes pratiques d’alimentation de complément des jeunes enfants et de mesures favorables connexes. L’UNICEF a notamment cherché à inciter les personnes s’occupant d’enfants à se laver mieux les mains, à encourager les ménages à produire leur propre nourriture et à promouvoir l’utilisation de variétés d’aliments sous-consommés mais riches en nutriments pour l’alimentation des jeunes enfants. D’autres approches clés du programme intégré ZBRF ont été la communication adaptée au contexte pour le changement social et comportemental et le renforcement des systèmes alimentaires locaux à travers l’intégration de systèmes alimentaires résilients et sensibles à la nutrition dans les chaînes de valeur. Des activités de formation, d’accompagnement et d’évaluation des systèmes et de l’environnement alimentaires au niveau des communautés ont permis de renforcer les capacités de diverses parties prenantes multisectorielles en matière de consolidation des systèmes alimentaires locaux et de mise en œuvre d’interventions intégrées sensibles aux questions de nutrition dans différents secteurs.

Le programme avait pour objectif de renforcer la capacité des communautés à risque à pérenniser leurs avancées en matière de développement, et d’améliorer la résilience des ménages et des communautés face aux chocs et aux facteurs de stress. Les mesures relatives à la nutrition ayant été intégrées à un programme de renforcement de la résilience, la priorité était de mener une suite logique d’interventions en matière de nutrition dans les domaines de la sécurité alimentaire, du renforcement de la résilience et des moyens de subsistance afin d’améliorer l’alimentation des enfants dans les ménages vulnérables.

Résultats du programme

La mise en œuvre du programme de nutrition et de renforcement de la résilience a été un succès dans chacun des 18 districts, bien que les interventions aient été menées différemment dans certains d’entre eux. Une étude cas-témoin a confirmé que l’alimentation des enfants est désormais de meilleure qualité dans les communautés ciblées que dans des communautés similaires non bénéficiaires du projet ZRBF. Dans les communautés ciblées, les personnes s’occupant d’enfants âgés de 6 à 23 mois sont jusqu’à trois fois plus susceptibles de leur fournir en temps opportun une alimentation de complément diversifiée et adaptée à leur âge, en continuant de les nourrir au lait maternel jusqu’à l’âge de 2 ans ou plus (OR = 3,88, intervalle de confiance : 2,28-6,60, p < 0,01)(Matsungo et al., 2022). 

L’établissement de partenariats solides entre les parties prenantes a facilité la mise en œuvre efficace d’interventions communes à différents secteurs. Dans les 14 districts où les partenariats entre parties prenantes et la collaboration intersectorielle ont bien fonctionné, les communautés ont rapidement bénéficié des interventions en faveur de la nutrition, ce qui a permis d’en étendre la couverture et de favoriser l’adoption de comportements recommandés en matière de nutrition. Dans les quatre autres districts, la collaboration entre parties prenantes a posé des difficultés qui ont entravé le déploiement de mesures intersectorielles et limité la couverture des interventions menées au titre du programme.

Leçons apprises

L’adoption d’une approche systémique a permis de mener des interventions d’amélioration des pratiques d’alimentation de complément pour les jeunes enfants dans le cadre du programme de renforcement de la résilience, ainsi que d’adapter le cadre d’action pour améliorer l’alimentation des enfants. Le leadership fort des pouvoirs publics, en particulier au niveau infranational, s’est révélé essentiel à la mise en œuvre réussie du cadre d’action.

Le programme a fourni des informations importantes sur les facteurs déterminants pour la mise en œuvre du cadre d’action dans les contextes où les ressources sont limitées. La communication pour le changement social et comportemental fondée uniquement sur le renforcement des connaissances ne permet pas d’améliorer l’alimentation des enfants, même lorsque des activités complémentaires mènent à la production d’une plus grande diversité d’aliments. Il s’avère plus utile d’adopter des approches pratiques ou d’encourager les communautés à « apprendre par la pratique » afin de modifier les comportements. Le renforcement de la résilience (notamment grâce à la génération de revenus, aux associations d’épargne et de prêt, à la culture d’une plus grande variété d’espèces résistantes et à la consolidation des chaînes d’approvisionnement) contribue à améliorer les pratiques d’alimentation de complément. Enfin, les dirigeants communautaires ont joué un rôle clé dans la réussite de la mise en œuvre multisectorielle du cadre d’action.

La mise à profit du projet de renforcement de la résilience sensible aux questions de nutrition (qui bénéficiait d’un financement adéquat) et l’utilisation de structures publiques existantes ont permis d’adapter facilement le cadre d’action pour l’amélioration de l’alimentation des enfants. D’autres pays à faible revenu pourraient adopter cette approche.

Conclusion

Les trois exemples apportés ci-dessus révèlent qu’une analyse adéquate de la situation et l’utilisation du cadre d’action de l’UNICEF pour définir des mesures stratégiques peuvent contribuer à améliorer l’alimentation des jeunes enfants à l’échelle nationale. Les exemples de l’Éthiopie et de la Tanzanie montrent que l’organisation d’ateliers au niveau national incite les dirigeants à modifier leurs politiques et à s’engager résolument en faveur de l’amélioration de l’alimentation des jeunes enfants. Au Zimbabwe, la combinaison d’une approche multi systèmes au renforcement de la résilience des communautés a offert la possibilité d’impulser des changements concrets et d’instaurer un environnement favorable aux changements à long terme nécessaires à l’amélioration de l’alimentation des jeunes enfants.

 

Pour obtenir plus d’informations sur le cas de l’Éthiopie, veuillez contacter Nardos Birru à l’adresse nbirru@unicef.org.

Pour obtenir plus d’informations sur le cas de la Tanzanie, veuillez contacter Tuzie Ndekia à l’adresse tedwin@unicef.org.

Pour obtenir plus d’informations sur le cas du Zimbabwe, veuillez contacter Dexter Chagwena à l’adresse dchagwena@unicef.org.

Références

Baye K, Hirvonen K, Dereje M et al(2019) Energy and nutrient production in Ethiopia, 2011–2015: Implications to supporting healthy diets and food systems. PLoS ONE, 14, 3. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0213182

Ethiopian Public Health Institute and the World Food Programme (2021) Fill the Nutrient Gap, Ethiopia. Addis Ababa, Ethiopia: Ethiopian Public Health Institute and the World Food Programme. https://docs.wfp.org/api/documents/WFP-0000130144/download/

GAIN and UNICEF (2019) Affordability of Nutritious Complementary Foods in Tanzania. Geneva, Switzerland: GAIN. https://www.gainhealth.org/sites/default/files/publications/documents/gain-unicef-rising-project-affordability-of-nutritious-complementary-foods-in-tanzania-2019.pdf

GAIN and UNICEF (2021) Comprehensive Nutrient Gap Assessment (CONGA): Micronutrient Gaps During the Complementary Feeding Period in Tanzania. Geneva, Switzerland: GAIN. https://www.gainhealth.org/sites/default/files/publications/documents/comprehensive-nutrient-gap-assessment-conga-micronutrient-gaps-during-the-complementary-feeding-period-in-tanzania.pdf

Matsungo T, Kamazizwa F, Mavhudzi T et al (2022) ZRBF The Care Group Approach, Infant and Young Child Feeding, Dietary Diversity and WASH Behaviours in Rural Zimbabwe: A Case-Control Study. ZRBF Learning and Process Evaluation Manuscript (in preparation).

UNICEF (2020) Improving Young Children’s Diets During the Complementary Feeding Period: UNICEF Programming Guidance. New York: UNICEF.


1 L’outil Fill the Nutrient Gap du PAM permet d’analyser la situation en matière de nutrition dans un pays, en plus de déterminer les obstacles empêchant l’accès à des régimes alimentaires sains, les canaux permettant d’atteindre les groupes de population vulnérables sur le plan nutritionnel, ainsi que les politiques et les interventions qu’il serait possible de mettre en œuvre dans différents secteurs (dont l’agriculture, la santé, la protection sociale et l’éducation) au titre de programmes pour améliorer l’accès à des aliments nutritifs.

2 Cette méthode fournit des conseils sur la manière d’exploiter les différents types de données existants afin d’évaluer l’importance en termes de santé publique des carences en nutriments d’un groupe de population, en plus d’identifier les aliments qui permettent de pallier au mieux ces carences.

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